TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

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Miguel Hernandez - Recueil des absents - Extraits traductions Jean Gabriel Cosculluela & Charles Juliet


5


Tout au fond de l’homme
ce puits d’eau trouble.

Dans la source d’eau claire
je veux voir la vie.

Tout au fond de l’homme
ce puits d’eau trouble.

Dans la source d’eau claire
cette ombre, seule.

Tout au fond de l’homme
ce puits d’eau trouble.


11


Tu étais comme le jeune figuier
du ravin.
Quand je passais
tu rêvais de montagnes.
Comme le jeune figuier,
resplendissant et sombre.

Tu es comme le figuier.
Comme le vieux figuier.
Je passe à présent dans le bonjour
silencieux des feuilles sèches.

Tu es comme le figuier
dans la lente lumière de la vie.

 

16


Corps de l’aube:
fleur corps même de la fleur.
Je sais que ta vie
n’est que la vie de la fleur.
Coeur qui l’espace
d’un jour s’ouvre se ferme.
La fleur n’a jamais un an,
elle le fête sous terre.

 

17


Dans ce champ
il y eut la mer.
La mer un jour le retour de la mer.
Qu’une goutte d’eau un jour
effleure le champ et ce champ
se souvient de la mer.
La mer un jour le retour de la mer.

 

21


Ainsi les saisons
et les ports ont l’odeur de la mort
Ainsi quand nous mourons
se défont les mouchoirs de silence.

Nous sommes des corps de vie enterrée
sur l’horizon, loin.

 

26


J’écrivis sur le sable
les trois noms de la vie:
la vie, la mort, l’amour.

Une rafale de vent,
de si loin si souvent, de la mer
vint nous effacer.

 

88


Brûle les deux portes,
donne la lumière.
Je ne sais pas ce qui m’arrive
je trébuche dans le ciel.

 

94


Je voulus dire encore adieu
et je vis seulement ton mouchoir de silence
s’éloigner.

L’impossible.

Un vent de poussière vint
m’aveugler, m’étouffer, me blesser.
Depuis lors j’avale la poussière.

L’impossible.

 

Ces extraits viennent de paraître dans le n° 40 de la revue "Lieux d'être" (Eté 2005)

Traductions de textes de Miguel Hernandez, publiées dans les revues Conférence, Lieux d’être & Scherzo. Par les mêmes traducteurs.

Notes

Miguel Hernandez (Orihuela, 1910 - Alicante, 1942). Fils de paysans. Berger. Autodidacte. Ami de Rafael Alberti, Vicente Aleixandre, Manuel Altolaguirre, José Bergamin, Federico Garcia Lorca, Pablo Neruda, Maria Zambrano... qu’il connaît pour la plupart au début des années 30. De 1939 à 1942, prisons de Madrid-Torrijos, Palencia, Ocana, Alicante: condamné à mort, puis condamné à trente ans de prison.
Miguel Hernandez nous laisse des livres de poésie: Perito en lunas, El Silbo vulnerado, El rayo que no cesa, Viento del pueblo, El Hombre acecha, Cancionero y romancero de ausencias ...
Il est aussi l’auteur de pièces de théâtre: Quien te ha visto y quien te ve y sombra de lo que eras, Los Hijos de la piedra, El Labrador de mas aire, Pastor de la muerte...

Les textes traduits sont extraits du Cancionero y romancero de ausencias qui regroupe des poèmes écrits entre le 19 Octobre 1938 et le 17 Septembre 1939. Poèmes brefs, intenses mais aussi longs poèmes polyphoniques: ce sont les derniers écrits par Miguel Hernandez.
Pour José Carlos Rovira, Romancero y cancionero de ausencias est un livre qui suppose “l’hypothèse d’une oeuvre restée inachevée”.
Ce livre vit de plusieurs tensions: la destruction quotidienne qu’est la guerre civile, la mort, les prisons, l’absence de l’aimée, Josefina Manresa, la mort de son premier fils en 1938 et la naissance de son deuxième fils en 1939.


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