Entretien
avec Valérie Linder par Cécile Glasman
1-
Comment es-tu venue au dessin et à l’écriture ? Est-ce
quelque chose que tu portes en toi depuis longtemps ?
J’ai l’impression que j’ai toujours aimé dessiner.
J’ai toujours voulu m’améliorer dans ce domaine, apprendre
comme si c’était la chose la plus importante à travailler.
En grandissant, cela a été une évidence de m’orienter
vers un bac philo/arts plastiques et de poursuivre en art appliqués.
Les croquis sur le motif, et particulièrement dessiner mes proches
ainsi que les paysages extérieurs, correspondent au besoin de faire
mes gammes, de m’entraîner. De ces échauffements naît
une véritable ivresse liée à l’intensité
et à la joie de l’observation, à la difficulté
aussi (le réel échappe - je pense aux mots de Giacometti
qui toute sa vie veut faire une tête et a le sentiment que cet objectif
se dérobe à chaque nouvelle tentative). Chaque fois, quand
je commence à dessiner, je me sens une débutante. Peu à
peu la confiance revient et permet la plongée dans la recherche,
le dessin au plus proche de l’observation et des sensations.
C’est tout à fait différent pour l’écriture.
J’aime depuis longtemps lire et écrire. Mais l’écriture
vient à côté ou mêlée avec des images.
Je me sens plasticienne des images et des mots mais pas écrivain
ou poète. Quand j’intègre des mots, ils sont souvent
indissociables des images. Je commence tout juste à m’autoriser
de courts textes sans référence aux images. Si je travaille
les mots, c’est dans le sens de la clarification, de l’évidence.
J’admire le travail que certains écrivains, poètes
font sur la langue. Ils la chamboulent et parviennent à lui garder
quelque chose d’immédiat, non sophistiqué ou tape
-à -l’oeil. Pour ma part, je ne sais pas le faire. Très
vite cela sonne faux et maniéré. Ma recherche se limite
à écrire modestement, en essayant néanmoins d’éviter
les clichés et l’ennui. Mes textes sont donc courts, ils
vont rapidement à ce que je veux dire. Je n’écris
que si nécessaire, par désir et pour expliquer quelque chose
que j’ai vécu ou observé. Très vite les images
arrivent et je les dessine en même temps ou juste après.
J’aime récupérer les mots imprimés, les morceaux
et fragments de phrases sont un point de départ. Je les associe,
les prolonge avec mes mots, dessins.... Le “hasard” de ces
débuts m’aide à trouver comment dire ce que je veux
dire.
L’écriture, dans sa dimension physique : manuscrite, typographique,
imprimée, tamponnée, découpée... est alors
un moteur essentiel pour créer.
2 -Y a t-il des créateurs
qui t’ont aidée à trouver ton univers propre ? Es-tu
inspirée dans ton travail par certains artistes ?
Oui, bien sûr, beaucoup de créateurs, dans tous les domaines,
m’intéressent, me touchent, me donnent de l’élan.
Je resterai dans le domaine des arts plastiques et arts appliqués
pour les exemples, sinon ce serait trop long à développer.
C’est Matisse et Klee qui m’accompagnent depuis mes 16 ans
je pense. La peinture (même si celle-ci n’est pas visible
dans les cartes postales et les illustrations de livres) et la couleur
sont les éléments essentiels qui motivent mon travail,
ainsi que la recherche de formes devenant signes.
Chez Matisse, force des contrastes colorés, puissance du dessin,
présence du voyage au Maroc. Chez Klee, vibrations des couleurs
dans les aquarelles du voyage en Tunisie. Objets-signes conduisant vers
une sorte d’abstraction magique. J’ajoute à ces inspirateurs
et modèles, Vuillard, Bonnard et Morandi que je vénère
pour leurs harmonies de gris colorés, leurs contrastes de qualité
(utilisation de couleurs vives en contraste avec des teintes rabattues
et rompues), ainsi que Delacroix et Rodin à travers la force,
délicatesse et spontanéité de leurs croquis (le
Maroc pour l’un, le corps féminin pour l’autre).
Je suis passionnée depuis toujours par les visages, c’est,
avec “la maison“, le thème que j’essaie de
travailler le plus en peinture. Les visages des peintres de la Renaissance
italienne me touchent particulièrement (Piero Della Francesca,
“La légende de Sainte Ursule” de Carpaccio), la peinture
du XVII ème plus précisément les personnages de
Vermeer et de Georges De la Tour (je pense en particulier à “Le
tricheur à l’as de carreau”) : leur douceur associée
à une certaine austérité. Il faut ajouter à
cette petite liste d’autres fréquentations très
importantes liées aux objets et à l’incongruité,
à la création d’atmosphères étranges.
Les peintures de Magritte, les collages mystérieux de Max Ersnt,
les affiches lettristes des dadaïstes.
Dans le domaine de l’édition et de l’illustration,
la liste serait longue aussi... Wolf Erlbruch, pour ses magnifiques
collages à la fois sobres et élaborés, porteurs
de sens, Anne Herbauts libre, créative, audacieuse illustratrice,
les éditions Esperluète et le Rouergue que j’admire
pour leurs prises de risques, leur inventivité et sensibilité.
Dans le domaine du design et de l’architecture : les approches
rigoureuses et poétiques des objets de Hella Jongerius et des
frères Bouroullec me fascinent, ainsi que les créations
de Frank Gehry et Herzog et De Meuron.
3- Comment tes créations naissent-elles ? Y a-t-il un élément
déclencheur ( émotion, lecture, paysage…) ? Est-ce
qu’elles s’articulent très vite autour d’un
fil conducteur, d’un thème ?
J’ai avant tout besoin de travailler avec mes mains. Nécessité
de bricoler, toucher, dessiner, peindre, coudre, sensations qui me recentrent,
me reforment quand je crains de me disperser, quand je ne sais plus
où j’en suis. Je me calme ainsi, dans le silence et la
concentration de l’atelier. Je ne travaille pas dans la douleur,
mais dans une certaine sérénité qui peu à
peu revient et s’installe. Tous les soucis s’éloignent
de moi quand je dessine (j’utilise ce terme “dessiner”,
en englobant tous les moyens d’expression), c’est une forme
de méditation active, bien sûr.
Parfois, je ne sais pas ce que je vais faire. Il suffit de commencer
quelque chose, ce qui s’impose le plus naturellement possible
et, en général, la suite s’enclenche, comme une
histoire. J’aime travailler des séries, des familles, et
raconter quelque chose, si possible une histoire. Des liens se créent
entre les travaux, c’est ce que je veux, mais sans m’enfermer.
Plusieurs recherches sont en cours, en parallèle et en résonance
je pense, même si je ne le perçois pas immédiatement.
Un voyage peut être un déclencheur. Je fais toujours beaucoup
de croquis sur place, De retour chez moi, quelque chose va émerger
de ces moments de dessin intenses jusqu’à l’ivresse.
Après un voyage à Fès, l’année dernière,
j’ai fait une série de recherches sur l’extérieur
et l’intérieur, en référence aux rues parfois
délabrées, aux murs fermés de la médina,
s’opposant aux intérieurs décorés et lumineux
des cours et jardins marocains.
Mais c’est sans doute la vie quotidienne qui m’apporte le
plus de pistes... Le thème de la maison et de ses occupants qui
entrent et sortent, est celui qu’il me tient le plus à
coeur de développer.
Observer, dessiner et écrire à partir des êtres
chers qui m’entourent est aussi une nécessité. Pour
garder des traces de leur évolution (et s’acclimater, prendre
du recul sur des transformations parfois difficiles à vivre)
et de mon regard sur eux, pour leur envoyer des messages d’amour.
Ainsi, une des thématique(s) va (vont) naître d’un
vécu ou d’un texte. Et c’est le fil que je vais dérouler
et qui va s’enrichir au cours de recherches diverses.
Le travail de création c’est aussi : laisser reposer, retravailler,
sélectionner, s’interroger. Rien n’est acquis, tout
est en mouvement et en chantier.
4-Je
me souviens de mon émerveillement lorsque j’ai reçu
une de tes cartes, envoyée par une amie, pour la première
fois. Ce qui me frappe et m’émeut, c’est qu’elles
sont comme des poèmes. Par leur construction d’abord :
tes séries portent un titre ( par exemple pour les dernières
: Météo des mots, Au fil des mots, A la fenêtre
des mots), elles sont aussi dédicacées. Et puis,
dans leur façon d’exister, car elles sont évocatrices,
ouvertes. Chacun peut les recevoir différemment selon sa sensibilité,
son imaginaire. Elles me semblent parler le même langage que les
poèmes …
Dans mes cartes postales je souhaite ne pas imposer un seul sens, une
interprétation unique. J’espère que le spectateur
peut entrevoir une histoire, en prenant appui sur les images, les fragments
de phrases que je propose.
De plus, la volonté est toujours d’instaurer un petit décalage
avec le réel. Quelque chose doit boiter, ne pas être lisse,
trop facile ou compréhensible. Il faudrait à chaque fois
que quelque chose étonne, fasse sourire. Il faudrait ne pas pouvoir
tout saisir d’emblée, et qu’une part d’inexplicable
reste toujours. C’est pour moi ici qu’il y aurait poésie.
Mais le désir de faire ces collections de cartes est d’abord
lié à mon attachement à la correspondance, la joie
procurée par le courrier amical ou amoureux. Faire des cartes
postales, c’est encourager l’échange épistolaire,
le lien. L’objet carte est, de plus, un petit cadeau populaire,
bon marché, qui peut être facilement accessible.
5 - Tu mêles plusieurs techniques : le collage, l’utilisation
de feuilles d’arbres, de tampons, la couture… C’est
important pour toi cette diversité de modes d’expression
?
Photos, écritures, collages, peinture... Ces mélanges
sont tantôt affirmés pour faire naître la sensation
de rencontres un peu étranges, tantôt discrets pour créer
un tout homogène où l’on ne peut plus clairement
distinguer la provenance de chaque élément.
Oui, c’est important la diversité, si elle ne confine pas
à la surenchère. J’essaie de trouver les moyens
les plus justes possibles pour exprimer une intention. Pour mes cartes,
j’utilise essentiellement un seul moyen plastique : le collage
d’éléments plus ou moins hétéroclites.
Bien souvent il n’y a que très peu d’éléments
associés.
La couture évoque plusieurs choses. Elle est d’une part
la trace d’une tradition familiale. Elle évoque aussi la
féminité, le temps, la patience, le lien et l’amour,
le bricolage, la blessure et la cicatrice...
Ramasser et faire sécher des feuilles, gestes que chacun peut
faire, gestes qui me relient à l’enfance et à l’émerveillement,
l’intérêt suscité par ce type de collecte.
Évocation du temps, de l’éphémère
des saisons, de la fragilité de ces feuilles que je conserve
avec soin et que j’aime protéger et recoudre, comme de
petits organismes précieux.
J’essaie d’explorer le potentiel expressif de moyens plastiques
réduits, pour dire quelque chose sans effets inutiles (par exemple,
pour les cartes “Ce que disent les feuilles”, seules les
feuilles séchées et quelques mots découpés
et cousus sur un support ligné doivent transmettre un univers,
une impression). J’aime bricoler avec des moyens modestes et à
portée de tout le monde.
6-Tes cartes font parfois référence
à l’univers scolaire : par exemple certaines sont imprimées
sur papier quadrillé ou ligné, tu découpes aussi
des mots dans des manuels anciens. C’est intéressant cette
manière dont tu détournes ces éléments pour
les rendre créatifs ( alors qu’ils sont souvent associés
à la contrainte, à l’étude ), pour leur donner
un second souffle…
L’univers scolaire m’intéresse comme lien à
l’enfance (la mienne, celle de mes enfants, de mes parents, grands-parents...)
et soif d’apprendre (globalement, de bons souvenirs) mais quand
je choisis des papiers à lignes, ce n’est pas à
cela que je pense.
Les papiers (papier ligné des cahiers, papier népalais,
recyclé, tramé, ingres, esquisse, de soie, imprimés,
kraft...), sont avant tout source de désir de dessiner et de
peindre, sensualité et sensibilité du support qui parle
déjà, même dans son état vierge. Les papiers
imprimés ou déjà utilisés, avec un vécu,
par la trace qu’ils portent, me suggèrent des directions
en lien avec l’atmosphère graphique qu’ils évoquent.
En ce qui concerne l’utilisation des vieux bouquins, je joue avec
les règles de grammaire découpées dans des manuels
de français trouvés dans les brocantes.
Ces ouvrages contiennent souvent des leçons de morale et de bonne
conduite, des histoires désuètes. Je les détourne,
leur donnant un autre sens en les fragmentant et en les associant à
de tout autres contextes. L’utilisation des conjugaisons, comme
des récitations, correspond à mon goût pour une
sorte de forme à la fois modeste, populaire et précise
de l’écriture.
7-J’aime beaucoup la façon
dont tu animes les mots : lettres en multitude formant le cœur
d’une fleur, mots devenant brins d’herbe sous des chaises,
mots gouttes de pluie. Comme si les mots étaient des éléments
vivants, faisant partie de notre paysage au même titre que l’arbre
ou le nuage ?
Oui, j’utilise et je vois les mots comme des éléments
physiques, et au même titre qu’une matière picturale
ou graphique. Au début, quand je travaillais avec cette matière,
je ne prenais pas en compte la signification des mots, c’était
un jeu graphique uniquement. Au fil du temps, il m’est apparu
nécessaire de ne pas m’en remettre qu’au seul hasard
des découpages. Même si la part d’inattendu reste
très présente, j’ai besoin que le sens des mots
utilisés, même fragmentés, ait un lien avec ce que
je veux exprimer. Dans les cartes postales, les objets parlent, se prolongeant
avec des ondes, des flots, des bribes de paroles. Les chaises par exemple
invitent le lecteur-spectateur à s’installer à l’intérieur
de l’image dans une atmosphère de chaleur et d’accueil,
d’apaisement.
8-On retrouve beaucoup l’élément
fil dans tes cartes et je remarque qu’il y a souvent un mouvement
vers le haut, aérien, comme quelque chose qui permettrait d’échapper
à la pesanteur. Par exemple, dans cette carte où des oiseaux
tirent des fauteuils, qui flottent ainsi dans l’air. Y aurait-il
là-dedans une possible métaphore de la relation humaine,
comme nous élevant, nous reliant à l’autre sans
nous emprisonner, mais en respectant au contraire notre liberté,
notre besoin de mouvement ?
Dans la suite de ce que je disais dans la question précédente,
les objets sont une présence amie, entre silence, écoute
et parole réconfortante. Oui, bien souvent mes dessins partent
vers le haut. Les mots deviennent nuages, oiseaux, feuilles s’envolant,
ballon, bulles de savon... traduisant un très grand besoin de
légèreté, de douceur. Je fais des dessins pour
m’apaiser et si possible, j’essaie d’en faire profiter
les autres. Bien sûr, cela n’empêche pas que l’inquiétude
ou les questionnements existentiels puissent poindre ici et là,
car cela fait partie intégrante de notre condition d’humain.
Pour apprivoiser des évènements difficiles, rien de mieux
que de les regarder sous tous les angles et d’essayer de mettre
un peu d’humour. Tu évoques la carte avec les oiseaux qui
tirent les fauteuils dans les airs. Certes, cela semble rafraîchissant,
mais le texte associé “Mais comment ferai-je?”, peut
renvoyer quant à lui à la peur du vertige face à
la nouveauté et à l’inconnu de la vie. Mes cartes
sont toutes remplies de questions que je me pose et que je pose aux
autres, sans en avoir l’air au premier abord peut-être,
pour éviter la pesanteur de l’angoisse.
Dans un certain nombre de mes productions, il y a, en complémentarité,
l’enracinement dans le sol, la terre, l’énergie des
arbres, des plantes. Une manière de me sentir en contact avec
le réel, de ne pas perdre pied ou m’enfermer dans ma bulle.
9-Tu as illustré plusieurs recueils
de poèmes, je prendrai pour exemple deux d’entre eux :
La belle vitesse d’Ariane Dreyfus, publié au Dé
bleu en 2002 ( collection Le farfadet bleu) et Du baume stick dans
la douceur d’Amandine Marembert publié à La
Yaourtière éditions en 2009. Comment cela se passe-t-il
quand tu illustres les poèmes de quelqu’un d’autre
? Comment cheminent-ils en toi ? De quelle façon t’en imprègnes-tu
?
Mon imaginaire ne se met pas forcément en route instantanément,
à la lecture du texte. À vrai dire, le temps de maturation
est très variable. La plupart du temps cependant, je lis et relis,
analyse les textes, en écrivant ce que j’en comprends,
les traduisant avec mes mots. Peu à peu, suite à cette
approche approfondie, un thème principal et une ambiance vont
s’imposer. Je commence à travailler cela, baignée
des mots de l’auteur et naturellement les recherches plastiques
vont s’enchaîner et se développer, se répondre
par lien, opposition, complémentarité, accentuation...
Je fais une diversité de propositions afin d’avoir plusieurs
pistes car mon souci c’est aussi que l’auteur se retrouve
dans mes traductions plastiques. Je ne veux jamais imposer mes images,
je cherche jusqu’à ce que le poète soit à
l’aise avec l’univers que j’essaie de mettre en place.
C’est un cheminement. Au début, je suis seule avec les
poèmes, souvent, je ne connais pas l’auteur, je ne l’ai
jamais rencontré, je ne lui ai jamais parlé. Ce n’est
qu’après avoir suffisamment avancé (afin d’avoir
ma propre vision, être libre, audacieuse, sans influence, sans
explications de l’auteur) que le chemin peut se poursuivre avec
l’auteur et l’éditeur, sous la forme d’allers-retours.
J’écoute ce que l’on me dit, et je m’applique
à évoluer. Cette découverte de l’univers
des auteurs est vivifiante, cela m’amène toujours à
créer des choses que je n’aurais jamais imaginées
sans ces aventures. Je les en remercie de tout coeur. J’ai eu
une très grande chance dans ces rencontres. Des auteurs magnifiques,
pleins d’une belle humanité et sincérité.
10-Ce que je trouve formidable dans ces deux livres c’est la façon
dont tes illustrations rencontrent les textes, la manière dont
ils s’agrandissent mutuellement. Pas de « côte à
côte » là-dedans, au contraire c’est comme
si tes images mettaient en mouvement les poèmes et réciproquement…
comme une infusion de deux univers….
Les images, comme les mots ne doivent pas tout dire, dévoiler.
Les images accompagnent sans chercher à reproduire le texte.
Textes et images sont ainsi deux partitions parallèles, autonomes
qui parfois se rencontrent et surtout se font échos, proposent
des correspondances, des clins d’oeil. En essayant de déceler
une thématique essentielle qui me paraît irriguer un texte,
j’évite sans doute un certain mimétisme.
11-La belle vitesse
d’Ariane Dreyfus évoque le regard émerveillé
en même temps que bouleversé d’une mère qui
voit ses enfants grandir. On retrouve quasiment dans toutes tes illustrations
la forme ovale, avec une palette de couleurs entre le bleu et le rose,
et agencée différemment selon les pages ( prenant tout
l’espace, ou en haut ou en bas…). Cette rondeur et ces teintes
m’évoquent à la fois le ventre maternel, le cycle
de la vie, le mouvement des enfants, leurs premiers dessins aussi. Est-ce
que cette forme s’est immédiatement imposée à
toi à la lecture des poèmes d’Ariane ? Que représente-elle
pour toi ? 12-Tes illustrations dans ce recueil parlent à la
fois du dedans ( la maison, l’escalier, la fourchette, la chaise
) et du dehors ( les fleurs, les nuages, les arbres, la lune…).
Comme ce mouvement qu’est grandir vers le dehors, à la
rencontre du monde ?
13-Beaucoup de mouvement dans ces images : mouvement circulaire des
ovales, comme jamais arrêté, sorte de tourbillon, et puis
mouvement vers le haut ou vers le bas des flèches. Il y a aussi
des collages d’extraits de manuels de mathématiques ( dessins
géométriques, papier millimétré), qui créent
un décalage amusant autour des deux sens du mot « vitesse
», concret et abstrait. Est-ce que cela renvoie aussi à
l’école, premier lieu extérieur auquel sont confrontés
durablement les enfants ?
Tu as tout à fait saisi ce que j’ai souhaité exprimer
par cette forme ronde et récurrente. Le lien avec le cycle de
la vie, l’évolution, le mouvement, le dynamisme, la légèreté,
la douceur... ces notions étant inhérentes aux poèmes
d’Ariane.
J’ai travaillé sur la transformation, variation, à
partir d’une même forme (le cercle), et les différents
sens qu’il est possible d’y voir (terre, lune, tête,
ballon, spirale...). Mon intention est de suggérer tout cela
à travers cette forme, plus que de le représenter.
Cette forme ne s’est pas imposée à moi, c’est
Ariane qui l’a choisie. Notre première rencontre a été
délicate. Ariane ne me connaissait pas et elle souhaitait qu’une
autre plasticienne illustre ses textes. C’est Louis Dubost qui
nous a mis en contact au Salon du Livre de Jeunesse de Montreuil. J’ai
lu les textes du livre avec Ariane et j’ai été complètement
enthousiasmée et émue. Ensuite, je lui ai présenté
un book que j’avais apporté avec moi. Elle n’a été
sensible qu’à des cercles que j’avais tracés
sur des papiers. Je l’ai prise au mot et me suis donnée
comme objectif d’illustrer son texte à partir de cette
forme. Je me suis lancée dans mes recherches, et peu à
peu j’ai réalisé que cette figure était parfaitement
intéressante et riche pour accompagner le texte d’Ariane.
Nous nous sommes revues quelques mois plus tard et elle a été
convaincue par mon travail. Nous avons cheminé ensemble, et depuis,
elle m’a donné la chance d’illustrer ses trois dernières
couvertures de recueil. C’est une très belle histoire d’amitié,
avec une grande poétesse, d’une sensibilité, d’une
humanité et d’une exigence très profondes.
14
-Du baume stick dans la douceur d’Amandine Marembert
évoque le tremblé du désir, une sensualité
en osmose avec la nature. Tes illustrations sont toutes en douceur et
délicatesse. J’aime beaucoup la façon dont la feuille
d’arbre dans tes images devient métaphorique du corps féminin
: envahie de rouge désir, morcelée et recousue, éparpillée
dans le vent, grise avec très fine cicatrice rouge dans les nervures,
percée très légèrement et pleurant….
C’est Magali Thuillier qui est à l’origine de ma
rencontre avec Amandine Marembert. Quand j’ai lu les textes d’Amandine
pour la première fois, j’ai eu l’impression de ne
rien comprendre, le mystère restait entier. J’étais
fascinée. Comment illustrer ce texte? Le thème de la peau
s’est finalement imposé. Il m’a guidée. Les
frottages d’objets, de feuilles expriment le contact du corps
avec le monde extérieur, avec le corps de l’autre. Le texte
traduit une difficulté, une distance, une pudeur dans le lien.
Il y a la présence de la main chaleureuse qui masse associée
à un langage plus froid issu des notices de boîtes de médicaments.
Ce langage médical a été la deuxième clé
car il évoque le collage d’un univers dans un autre, notion
particulièrement porteuse de créativité, de décalage,
d’incongruité (à la manière des dadaïstes
et surréalistes). Enfin, la troisième piste s’est
imposée vers l’évocation de l’univers végétal
du jardin, comme ancrage dans le quotidien ressourçant. Finalement,
je me suis rendue compte que ce texte, au début difficile pour
moi, était d’une incroyable richesse. Il m’a fait
avancer personnellement. Bizarrement, je m’y suis reconnue.
15-Il me semble que tous ces détails
très fins disent aussi notre fragilité, nos failles, nos
fissures. Avec en contre-point tous ces gestes évoqués
dans les poèmes et repris dans tes illustrations, qui procurent
l’apaisement : la cuillère qui revient et rappelle le sirop
qu’on nous donnait enfant, la main qui apaise, le petit récipient
qui recueille les larmes et pourrait être métaphorique
de l’écoute, les extraits d’ordonnance qui sont aussi
des mots dans leur pouvoir rassurant…
C’est exactement cela Cécile, ton regard sensible capte
mes intentions et va au-delà, merci pour ton regard généreux.
16-
Ton livre Grammaire de l’amante, a été
publié en 2005 aux éditions Esperluète. J’aime
beaucoup l’audace de ce titre, qui associe deux termes contrastés,
l’un évoquant les règles langagières, l’autre
l’amour et le désir, autrement dit ce qu’il y a en
nous de plus libre. Je me suis demandé si ce qui les liait n’était
pas la créativité, cette façon qui permet à
chacun de s’approprier le monde à sa manière. Car
le langage, même régi par des règles, est aussi
ce que nous en faisons. Nous nous l’approprions pour y exprimer
notre singularité. De la même manière, toutes les
histoires d’amour se ressemblent, mais chacun réinvente
à chaque fois le sentiment amoureux et le désir...
17-Ce recueil parle du corps féminin dans son désir, sa
rêverie érotique, son attente du corps de l’autre,
et enfin dans l’étreinte amoureuse. Ce qui m’a frappée
d’emblée, dans ce livre, c’est la liberté,
la plénitude du corps qui est y exprimée. D’ailleurs
on sent le corps vivant, allongé entre les pages comme dans des
draps. Et la façon dont les encres s’étalent m’évoque
aussi une dilatation du corps, comme dépassant ses propres limites
dans l’érotisme. Il me semble que lui répond une
grande liberté formelle : à la fois dans l’utilisation
de techniques diverses ( collages de mots, de photos, encres, couture
) et dans les manières différentes des dessins de respirer
sur les pages : parfois prenant tout l’espace, parfois laissant
place à de petits détails…
Ce qui m’amusait surtout c’était d’essayer
de faire dire aux leçons de morale, sorties de leur contexte,
détournées, donc, l’inverse de leur propos ou esprit
initial. C’est aussi l’enfant sage qui sort de l’image
ou de la confortable cage dans laquelle elle s’était laissée
enfermer, pour ne pas faire de vagues. C’est l’évocation
de l’envers du décor, du plus secret, des choses qui ne
se disent pas. C’est oser, en tant que femme, parler de sexualité
sans être vulgaire. En parler avec douceur certes, mais en parler
vraiment. Parler du désir et du plaisir. Mais pas comme une norme
ou un but à atteindre. On ne sait pas si le personnage du livre
rêve, fantasme ou vit réellement ses désirs. Elle
s’amuse et surtout, elle essaye de mieux connaître son corps,
dans les moindres zones. La plupart du temps, elle est seule. L’homme
n’apparait que très peu (si je refaisais le livre aujourd’hui,
il n’apparaîtrait plus). Le livre peut être interprété
comme une auto-initiation à la sensualité, avant de s’ouvrir,
éventuellement à l’autre. J’ai fait ce livre
en pensant aux femmes qui se sont senties coupées de leur corps
pendant une période plus ou moins longue de leur vie.
Au moment de ce livre, je faisais depuis quelques années du modèle
vivant chaque semaine. J’étais immergée dans cette
thématique du corps, je remplissais des carnets de femmes posant
nues. Ces femmes faisaient souvent des poses courtes, de 30 secondes
à 10 minutes. Beaucoup de poses en mouvement. J’ai eu envie
de fabriquer quelque chose avec cette recherche. L’histoire s’est
peu à peu imposée, je l’ai travaillée sur
quatre années.
18-J’aime beaucoup la manière
dont tu restitues des lieux, des gestes, à travers des détails
infimes : une baignoire, une penderie ou une commode, des sous-vêtements
sur le sol, une enveloppe, une jupe bleue, un flacon de parfum…
Est-ce que pour toi les ambiances, les sentiments tiennent dans les
petites choses ?
Oui, je suis très sensible aux détails bien sûr,
et à la poésie du quotidien. Je crois que tout ce qui
m’entoure est “normal”, connu, et puis si j’observe
bien, tout est étonnant et subtil. Les objets choisis dans le
livre sont liés à l’univers et au langage de la
séduction féminine. Univers à la fois banal et
touchant. Quelle jeune fille, quelle femme n’a pas un jour dans
sa vie hésité pendant de longues minutes face à
sa penderie, avant un rendez-vous amoureux? J’aime sourire de
mon attitude, le fait d’être sujette moi aussi à
ce jeu de l’apparence qui révèle malgré soi.
Dans la vie, je suis touchée par les personnes. Je retiens autant
une globalité qu’une multitude de petits détails,
comme des trésors.
19-Je suis touchée par la façon
dont tes dessins expriment, au-delà de la rencontre amoureuse
et sexuelle, l’accueil au monde, à ce qui vient. Beaucoup
de gestes d’ouvrir : offrande du sexe qui attend, mais aussi geste
d’ouvrir les bras, l’armoire ( pour y choisir une tenue
), fenêtre de la salle de bain ouverte sur un ciel bleu…
Oui, les espaces et les objets que je représente s’ouvrent
toujours. Timidement ou largement. Symboles d’espoir, volonté
et besoin de croire que la vie peut être belle.
20-Encore une fois, les matières
scolaires deviennent ici chemin d’invention, à travers
le prisme du registre sensuel, amoureux : la table des matières
évoque le choix d’une étoffe dans la préparation
de l’amante, la conjugaison le temps infini de l’amour,
la géographie l’espace intime, à découvrir
et partager, de son corps et de celui de l’autre…
C’est encore l’amusement des rencontres fortuites d’éléments
qui prennent un sens différent car dépaysés de
leur contexte initial. Ou, comment dire des choses intimes sans être
trop pesante ou psychologisante... L’une des métaphores
qui me parle le plus est celle du corps-géographie, parcours,
chemins.
21-Je trouve très intéressante
la façon dont les collages de mots accompagnent les dessins.
Les phrases, les mots eux-mêmes parfois sont coupés. Il
me semble que cela restitue très justement la manière
dont les mots en nous résonnent, font écho à ce
que nous vivons. Langage jamais figé, en mouvement perpétuel,
présent par bribes, circulant dans le vécu. Serait-ce
une manière pour toi de dire l’infini qu’est le langage
alors même qu’il est un matériau commun ?
Ces mots découpés, récupérés m’ont
surtout aidée à dire ce que je ne savais pas que je voulais
dire. J’ai un rapport un peu traumatisé vis à vis
des mots parlés (de vieilles histoires qui tardent parfois à
guérir). Les bribes de mots peuvent évoquer la peur de
dire complètement les choses (et l’incapacité à
mentir, puisque des choses sont tues mais celles qui sont dites partiellement
sont vraies). Elles peuvent en même temps être perçues
comme évocatrices et mystérieuses, ou comme véhicules
de liberté d’interprétation du lecteur.
22-Ton
livre J’habite une seule maison a été publié
en 2008 aux éditions Esperluète. Deux semaines et demie
qui disent le cheminement intérieur d’une femme. Je cite
un extrait : lundi, je suis perdue dans ma maison, silencieuse. mardi
je déménage un peu. mercredi j’ai fermé les
volets jeudi je ne sais plus où est la porte. (…°)
La maison comme métaphore du corps, de l’intériorité
? Une seule maison, est-ce que ce serait l’unité retrouvée
?
Oui, c’est exactement cela. On peut imaginer que la femme du livre
a vécu une période chaotique, dans laquelle elle était
divisée, partagée, et que cette situation s’est
révélée invivable. Il s’agit donc d’une
quête pour rencontrer ou retrouver ce sentiment d’unité
dont tu parles. Une seule maison pour davantage de sérénité,
d’équilibre, et au-delà de cela, pour une question
de survie et de respect de soi-même. Ne pas gaspiller son énergie
dans des situations inextricables.
23- Je suis frappée par la manière
dont les encres s’étalent sur la page, débordent
les surfaces qu’elles colorent. Comme si l’intériorité
et le monde étaient perméables l’un pour l’autre,
sans frontière précise, dans une fusion…
C’est intéressant ton interprétation. Je n’ai
pas pensé à exprimer cela, mais il est possible de donner
ce sens à ces encres qui sortent des limites. Les outils et le
langage utilisés sont avant tout au service d’une expression
spontanée, évoquant l’urgence de poser ces dessins
et ces mots sur le papier. Pour s’en libérer, pour prendre
du recul et construire un récit, même s’il peut paraître
décousu. Le geste du pinceau est rapide, les dessins et écritures
à la plume participent du même élan.
24- On retrouve dans ce livre la présence
importante du végétal : arbres, plantes, fleurs, feuille.
Cet élément pourrait-il être pour toi celui de l’équilibre,
de l’ancrage dans l’existence ?
Je ne sais pas précisément pourquoi j’ai ainsi besoin
de la présence ou de l’évocation du végétal.
Ce qui est sûr c’est que je suis émerveillée
et émue par la beauté liée à la perfection
ainsi qu’aux accidents et cicatrices des lignes des feuilles,
arbres, fleurs. Il est possible de puiser de la force dans la contemplation
de ces éléments.
25- Il y a, parsemant ce recueil, des
images fortes, remuantes : le visage d’une femme crayonné
dans le prologue, plus loin un arbre qui semble saigner, un homme en
équilibre au-dessus d’un précipice, l’ombre
démultipliée d’un homme. Autant d’images qui
m’évoquent la souffrance et en contre-point lumineux, aérien,
l’échelle et l’escalier, qu’on retrouve dans
de nombreuses pages, comme un moyen de s’élever, de se
libérer…
En effet, c’est le thème essentiel du livre. Se libérer
de la souffrance en la regardant en face, mais sans tomber dans l’explication
appuyée des faits qui ont provoqué la douleur. Il y a
une dimension symbolique dans les dessins. Quand le personnage féminin
a le visage qui disparaît sous de violents coups de crayons, cela
peut faire écho avec l’effacement de sa personnalité,
ou le fait qu’elle ne sache plus qui elle est. L’oiseau,
l’échelle, l’escalier sont quant à eux, symbole
d’échappatoire, pour peu que le personnage les voie.
26- Je suis émue par la façon
dont le cosmos semble veiller sur cette femme : la lune, le bleu du
ciel, un personnage ailé tel un ange survolant les maisons. Comme
si la solitude n’était jamais totale, comme si le monde
nous habitait, veillait sur nous…
Je ne voulais surtout pas un livre sombre. Il s’agit au contraire
d’une histoire de renaissance et de reconnaissance des êtres
qui nous entourent de leur patience et de leur confiance viscérale
(symbolisés par ces éléments aériens que
tu cites). Cette femme, après avoir souffert et cheminé,
parvient à trouver ou retrouver l’essentiel de ce qui la
rend vivante. Elle choisit la douceur, la bienveillance, la discrétion
de celui qui est à ses côtés depuis longtemps. Elle
arrête d’accepter la violence d’un autre, pour retrouver
l’amour de celui qui est toujours resté au fond d’elle-même,
qu’elle n’a jamais pu ou voulu quitter. Elle arrête
de mentir et de se mentir, elle parvient à se défaire
d’une sombre dépendance qui la rongeait.
27-
Ce chapelet de jours dans ton livre m’évoque les comptines
enfantines. De même que, dans le livre hommage à l’éditeur
Louis Dubost, publié aux éditions Cadex, Un éditeur…voilà
!, tes illustrations autour de lettres me font penser aux abécédaires.
C’est important pour toi l’esprit d’enfance ?
Oui, l’esprit d’enfance est sans doute très présent
dans mes travaux, mais je ne cherche pas particulièrement à
l’exprimer. Il est probablement inhérent à des aspects
de ma personnalité à la fois naïve, rêveuse
et intransigeante. Si mes images évoquent l’enfance, c’est
peut-être aussi parce que je cherche à aller à l’essentiel.
Je suis de plus très reliée à mes enfants et par
leur intermédiaire, à l’univers des comptines, petites
chansons et histoires magiques. Je me sens imprégnée par
cet environnement dont j’aime la grâce, la drôlerie
et le sérieux.
28- Pourrais-tu nous raconter la naissance
de ce livre-hommage ?
C’est l’Université de Nantes, avec Claudine Paque,
Françoise Nicol et leurs étudiants, qui m’ont sollicitée
pour illustrer ce livre (“Un éditeur ...voilà!”
ouvrage collectif composé des lettres de 20 auteurs publiés
au Dé Beu) hommage à Louis Dubost qui pendant 30 ans a
édité des poètes contemporains. Le jeu avec les
5 lettres de “merci” traduit mon souhait de proposer un
regard tendre et drôle pour s’adresser à Louis et
refléter l’esprit des lettres des 20 auteurs. En même
temps que le mot “merci” apparait, on suit l’évolution
suggérée d’un auteur qui écrit un texte,
l’envoie à l’éditeur et attend sans plus rien
faire (terrorisé qu’il est de l’éventuel refus),
puis finalement se réjouit d’être accepté
dans la famille du Dé Bleu.
29-
Dans Des sourires et des pommes, qui vient de paraître
aux éditions Cadex, collection le farfadet bleu, tu nous offres,
à travers tes illustrations qui accompagnent les poèmes
de Louis Dubost, un véritable jardin de papier. On retrouve cet
équilibre entre terre et ciel, les racines et la liberté,
à travers l’escargot d’une part, l’oiseau et
la libellule d’autre part. Je trouve que ces trois animaux emblématiques
du jardin évoquent chacun à sa manière une facette
de la figure de l’artiste : la lenteur et la patience d’un
travail artisanal, le chant de liberté et enfin la grâce
légère de l’art qui permet d’échapper
à la pesanteur du quotidien…
Comme toujours tu observes de près les images... Les trois animaux
dont tu parles sont avant tout emblématiques de l’univers
de Louis Dubost, je pense que l’interprétation que tu proposes
l’intéresserait, elle me parle beaucoup.
À partir des textes de Louis, c’est peu à peu la
lettre O qui s’est imposée, et j’ai joué avec,
en essayant d’établir des correspondances avec le texte.
Ce O évoque évidemment la pomme mais aussi le O de “mots”
dont il est beaucoup question dans les textes. Ce O est ensuite soleil,
bulles d’eau, coquille de l’escargot... Le O roule tout
le long du livre et on suit ses rencontres et ses métamorphoses.
30- Pour finir, pourrais-tu nous parler
de tes projets à venir : livres, expositions ? Ce serait pour
nous une belle manière de continuer à voyager dans ton
univers enchanteur du quotidien…
Mes projets : avant tout continuer à chercher, à travailler
pour moi, dans mon atelier.
Ces recherches sont une récréation, un espace réellement
personnel dans lequel je me source et me ressource.
Et aussi: continuer à rencontrer des auteurs qui ont envie d’échanges
et de partages. C’est toujours très émouvant quand
un auteur me propose de créer des images pour accompagner ses
textes. J’ai beaucoup de projets en chantier, avec des auteurs
déjà publiés ou pas encore publiés...
Deux nouveaux livres doivent paraître en 2011, dont l’un
avec les textes de ma soeur Anne Bonin.
De nombreux projets n’ont pas encore trouvé d’éditeurs,
mais je ne désespère pas...
Plusieurs expos, notamment à la médiathèque de
Saumur en mars 2011 où je suis invitée par Albane Gellé
dans le cadre du Printemps des poètes.
Je vais aussi exposer à la Maison d’Arrêt de Nantes
en mai 2011.
Je m’occupe aussi de diffuser mes petites collections de cartes
postales, et pense à une 9ème collection pour 2012...
Bibliographie de Valérie Linder :
Images pour La belle vitesse, sur des poèmes d’Ariane Dreyfus,
L’idée bleue, 2002
Grammaire de l’amante, Esperluète, 2005
Images pour Parfums, sur des poèmes de Hoai Huong Nguyen, l’Harmattan,
2005
Créations pour la collection Poïein (www.poiein.eu )- Livres
d’artistes- 2006
Couverture pour L’inhabitable, poèmes d’Ariane Dreyfus,
Flammarion, 2006
Couverture pour la création de la collection mots-nambules, L’idée
bleue, 2006
Images pour Mange-matin, sur des poèmes de Valérie Rouzeau,
L’idée bleue, 2008
Couverture d’Iris, c’est votre bleu, poèmes d’Ariane
Dreyfus, Le Castor Astral, 2008
J’habite une seule maison, Esperluète, 2008
Images pour Du baume stick dans la douceur, sur des poèmes d’Amandine
Marembert, La Yaourtière, 2009
Images pour Déserts sur des poèmes d’ Hoai Huong Nguyen,
l’Harmattan, 2009
Images pour Des sourires et des pommes, sur des poèmes de Louis
Dubost, Cadex, 2010
Images pour Un éditeur voilà !, ouvrage collectif-hommage
à l’éditeur Louis Dubost, Cadex, 2010
Sur internet :
Une très belle note d’Amandine Marembert
sur Des sourires et des pommes, à découvrir sur Poezibao
http://poezibao.typepad.com/poezibao/fiches_de_lecture/page/2/
Et pour avoir le plaisir de feuilleter ce magnifique
livre :
http://www.cadex-editions.net/article.php3?id_article=408&a=