Il
existe, pas loin de chez moi, un Marché de la poésie où
j’aime me rendre chaque été. J’aime y entendre
des lectures, flâner de livre en livre, en acheter quelques-uns
parce que quelque chose (un mot, une couverture) m’a rejoint,
c’est un temps très intime et très « retiré
». Peu d’échanges de paroles à ce moment-là,
mais beaucoup de gestes et de regards qui touchent.
Il y a des présences d’éditeurs
qui me marquent particulièrement. Ils publient quelques livres
par an, livres que j’ai appris à reconnaître par
leur format, la couleur du papier et de la couverture. Leur conversation
laisse parfois entendre que ça n’est pas sans difficultés.
Pourtant, j’avoue, c’est une profession qui me fait rêver…
Alors un jour, j’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai
osé poser quelques questions à deux d’entre eux.
C’est d’abord l’éditrice
de Paupières de terre qui m’a répondu. Voici ce
qu’elle a accepté de me confier :
Editrice à temps partiel – mais de cœur
entier - depuis 20 ans
Bien sûr, il est toujours possible de se lancer…
Désir, énergie, un peu (ou plus) de finances, un métier
nourricier en parallèle ne fait pas de tort. De solides connaissances
des métiers du livre ou une moyenne connaissance et une certaine
innocence. Je venais de la librairie, j’étais chômeuse,
j’ai emprunté une petite somme pour un an. Je ne pensais
pas durée, j’avais le fort désir de faire une chose…La
suite s’est faite d’elle-même !
Et puis j’ai rapidement eu un travail à mi-temps. Ensuite
des activités artistiques irrégulières mais qui
nourrissaient les finances de l’association que j’avais
crée. Enfin, une modeste retraite. Je n’ai pas le risque
quotidien de ceux qui font cela exclusivement. Je reçois quelques
adhésions ; j’ai dû faire des emprunts, tous remboursés
bien sûr. Et quelques dons importants ( de personnes croyant à
la liberté d’éditer et ayant confiance en mon travail)
ou modestes (dont les miens) pour permettre de ne pas passer au rouge,
dans ces dernières années, et de tout arrêter.
Il est vrai que je publie en partie de la poésie ; délicat
( moins de 1% de l’édition en totalité)… et
que je fais au mieux avec mes qualités, mes manques.
Déjà il y a vingt ans, le plus dur n’était
pas de faire un livre… mais de lui trouve place en librairie.
Rude tâche, plus encore à présent. Au début,
les libraires prenaient une part des risques, achetaient le plus souvent,
renouvelaient les livres. A présent, quand on est petit les premiers
mots sont souvent : Vous avez un diffuseur ? Non ? Désolés.
Ou encore : De toute façon ce ne sera qu’en dépôt.
Même si vous appréciez ? Oui.
Je sais, j’ai fait ce métier il y a trente quand c’était
déjà difficile. Il y a bien sur encore des libraires curieux
ou, au moins très aimables. Pour eux c’est aussi de plus
en plus rude mais je « reproche » à certains de vivre
trop au chronomètre (Faites voir vos livres ; j’ai tout
juste le temps) et d’avoir trop en tête la quantité
vendable rapidement. Il y a des limites à la façon de
faire ce beau métier.
Enfin, il faut vraiment désirer et aimer. Choisir..
La diffusion ? Soi-même ? Il faut être patient, entêté,
bonne santé, calme, dynamique, optimiste, avoir de bons muscles
pour porter les livres, être organisé, prévoyant,
calme, gracieux, impertinents, bon marcheur, bon caractère mais
ferme aussi... (le tout pouvant se dire au féminin).
Sinon travailler avec une, un représentant. Coût financier
à évaluer mais l’expérience, la connaissance
du milieu peuvent être d’une grande aide. Bien se choisir
mutuellement.
Rencontrer les lecteurs ? C’est possible par les
Marchés, Salons du livre, de la Poésie et diverse manifestations,
telles lectures chez des libraires, en bibliothèque… Très
gros travail, risqué souvent pour les finances (locations de
stand, voyage…) mais, bien des fois, c’est un grand plaisir
de rencontres (lecteurs, éditeurs, organisateurs… ) et
le bonheur de voir les lecteurs découvrir un livre, un auteur.
Cela mange beaucoup de temps : bien choisir ce que l’on fait et
ne pas regretter.
Les choix. Comme mes choix de libraire : j’aime,
j’y crois et je souhaite faire connaître, voyager tel texte,
tel auteur. L’amitié c’est autre chose ; une relation
peut s’établir mais le choix d’éditer se fait
pour le texte. L’amitié, quand il y a, c’est un bonheur
en plus et ça ne regarde que les personnes.
Oui, il y a du bonheur à soutenir un (e) auteur, à l’accompagner.
Une satisfaction de faire ce qu’il y a à faire. Etre là
discrètement, fidèle au parcours, à l’écriture.
C. A. Fille d’imprimeur au plomb, libraire puis
éditrice. Catalogue modeste : Deux livres par an. Des cartes
postales en typographie : du texte uniquement ; poésie, philosophie,
contes.
P.S : Les cartes postales en tout premier,
avant même de penser un seul livre. Les textes choisis un par
un, par désir de tel ou tel et l’idée de les faire
voyager par la Poste. Faire découvrir ou retrouver la poésie
par un seul texte qui peut se suffire ou donner envie de plus. Pessoa,
Rilke, Marie-France Vilcoq, Marina. Tsvetaeva, Marcel Cohen, Denise
Levertov, Mireille Fargier-Caruso, Ossip Mandestam, Oktay Rifat...
L’image devient de plus en plus reine. De plus en plus difficile
à présenter. Tant pis, je m’obstine.
Ce 9 mars 2009 C. A.
Précision : Paupières de Terre ne souhaite
pas recevoir de manuscrits, elle fait elle-même appel aux auteurs
qu’elle souhaite publier.
Extrait du catalague de Paupières de
terre
Paupières de terre BP 36 92122 Montrouge Cedex
– paupieres2terre@free.fr
Silence à vif, Mireille Fargier-Caruso
– 2e éd. – poésie – 2005
« hymne au provisoire… beauté précaire
des voix qui allège nos peurs » PVP : 13.50 euros
Ces gestes en écho, Mireille Fargier-Caruso –
poésie – 2006 …………….PVP :
14 euros
Du monde du chagrin, Jacques Roman/Bernard Noël –
2007 ………… PVP : 16 euros
fragments écrits sur le chagrin, auxquels réponds
B. Noël
Sur un blanc ruban de terre et d’encre, Jacques Roman
– 2007 …… PVP : 6 euros
Bribes d’enfance.
D’entente avec oui, Jacques Roman – poésie –
2008 ………………….. PVP : 11 euros
Le rêve du jeune home et autres voyages, Claire d’Aurélie
– contes 2008
illustrations : Hélène Rajcak ……………………………………………….PVP
: 8 euros
Celui qui vient le courrier à la main, François
Perche – récit – 4e éd.
Histoire vraie de facteurs et d’instituteurs républicains……………………
PVP : 4 euros
Air blanc, Odile Fix – bref récit – 2008
- livre « accordéon »
Chemin perdu dans la neige ………………………………………………PVP
: 8 euros
Mails du Sri Lanka, Solène Delahousse – témoignage
– 2007 – 2e éd.
Voyage, séjours, rencontres ; création d’une
entreprise dans un village
de pêcheurs. Beau regard sur l’autre. ……………………………………..
PVP : 5 euros
Un étranger resté attardé sur la piste,
Jacques Roman - comporte trois titres :
Lettera amorosa ; Un étranger resté attardé
sur la piste ; Sur un blanc ruban de terre
et d'encre. ……………………………………………………………………PVP
: 15 euros