Ce livre est traduit de l’Hébreu par Isabelle Dotan. Il
comprend des poèmes tirés du troisième livre de
Lyor Shtenberg et quelques inédits. C’est la première
fois qu’il est traduit en français. C’est tout à
l’honneur des éditions Gros Textes ! On ne dira jamais
assez le travail de ces « petits » éditeurs pour
porter aux hommes leurs poètes !
[Il n’est pas facile de saisir tout le visible.
L’éventail
de l’œil tremble sous l’effort
et sous le soleil.]
Ces trois vers me semblent bien refléter les
enjeux des poèmes traduits ici. Regarder le monde visible et
s’en saisir. Tenter de s’en saisir. De le ramener à
la lumière : dire. Dire ce qui est. Dire le désir et le
manque. [Je préfère habiter près d’une rivière
mais il n’y a pas de rivière dans cette ville.]. Ce regard
vif paraît ressembler à celui du promeneur, celui qui arpente
ses rues, sa ville, son désert, et le monde avec cette conscience
de partout passer et vivre comme un étranger [… voilà,
nous sommes revenus chez nous, étrangers] ; un précaire
en horizon
[La chute
tranquille
dans la nuit]
Les seuls passeports pour cette vie, outre celui de papier qui ouvre
les frontières, un poème parle d’une rivière
dont j’ai aimé suivre le cours : Shannon River (Irlande)
; sont ceux de l’amour
[… au bout de ton absence
patiente ton corps proche, humain
pour me donner une place véritable
dans le monde.] et de l’écriture [Que les poèmes
m’apprennent à sortir des poèmes.
Vivre.]
Voilà un petit ouvrage de 32 pages, avec l’écriture
d’origine en belle page et la traduction en regard, qui donne
envie de connaître davantage ce poète !
Belle page
Viens dormir avec moi
Viens dormir avec moi. Dehors l’hiver, le
vin
nouveau dans le verre. La musique est
bonne. Sur la table, un livre. Ses mots
pénètrent le monde : toute l’horreur
et l’inanité, le mal et le crime. Mais ce poème
est pour toi. Ce poème est mon corps
étendu près de ton corps ; il bouge
dans la pièce, dans la maison. Dors
avec moi, il se peut que nos corps produisent assez d’énergie
pour une ampoule incandescente, peut-être moins,
peut-être rien qu’une mèche de bonheur
entre la faim, le froid et la stupidité. Et alors ?
Titre : Eaux abondantes
Auteur : Lyor Shtenberg
Editeur : Gros Textes
ISBN : 2-35082-037-8
Année de parution : 2006
Prix : 6 €