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André Markowicz, Figures, Seuil, mars 2007

 

André Markowicz s’est regardé dans le ruisseau : son visage fait des vaguelettes. On a beau traduire Dostoïevski, Tchekhov, Gogol et j’en passe, on n'en est pas moins trahi par le vide laissé par les banquises étrangères qui fondent inexorablement aux marges du vinojenn cher aux pêcheurs du dimanche. Le poète aimerait cet Aven polaire. A force d’emplir, croit-on, sa vie de signes et d’arborescences, on « a des yeux/ qui ne se ferment plus/c’est le début de la convalescence », et partant « on peut choisir de vivre dans sa voix » ; on n’a jamais bien compris pourquoi l’humain est « trop ».
Trop peut-être de ce moi si susceptible de se fendre, d’éclater en cendres, d’exploser en un vol douteux malgré le doute même d’être sur la bonne piste. Bien sûr, il faut « se vouloir », se sentir habité par ses nerfs, ses cris, sa saga personnelle, son royaume d’inutile.
Marko, comme le surnomment certains, se ressemble, ici, dans ses Figures. Cet ensemble est son premier livre de poème non traduits. Je ne sais dans quelle mesure cette information est utile. Chaque langue sécrète ses beautés, ses étrangetés, ses défaites. Les éclaireurs ne sont jamais signe de reconnaissance, ou si peu, ou si loin.
Et puis, la figure dévisagée, guettée, créée de toutes pièces, dans quelle case la déposer, l’enjoindre de donner sa position ? L’écriture est là, mate. Même Dieu n’est pas à soi, c’est dire la vacuité de ses maquettes.
On assiste, lecture faisant, à la naissance, tour de force, passage de haies, du livre inédit de celui qui « dit la suite, de/ quels décombres réchappé, / de quelles fuites, quels / milliers de relecture – «, sauvé presque des eaux de la traduction, sauvetage dont le solde reste à écrire.
Cette image : « L’ange est autour de vous / sans parapluie » poursuit le lecteur attentif, ce même jusque dans les propres rêves d’André Markowicz.

proposition d'Olivier Hobé, revue Tremalo


 
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