«
Quelle bonne idée ils ont eu ! » Voilà
ce que je me suis dit en ouvrant le livre Attentivement, Charles
Juliet, recueil de lettres d’ami(e)s écrites sur la
sollicitation de l’association La Cause des Causeuses, à
l’occasion d’une rencontre inédite autour de Charles
Juliet qu’elle organisait pour le 10ème Printemps des poètes
à Lyon.
Attentivement, Charles Juliet est un livre accueillant. Sa lecture
vient éveiller le souvenir encore vif de sa propre rencontre
avec l’œuvre, on se reconnait dans l’expérience
et les mots des autres, heureux d’y trouver cette résonnance,
cet élargissement de la voix de Charles.
Une biographie des auteurs des lettres à la fin du livre fait
percevoir la variété des personnes touchées par
son œuvre. On y notera la présence de nombreux psychanalystes.
Il est heureux que des peintres et photographes aient aussi été
sollicités, je les aurais presque souhaités plus nombreux
tant leur apport enrichit le texte.
Bien sûr, certaines lettres m’ont plus marquée que
d’autres. Il en est ainsi de celle de Jean-Claude Bourdais que,
dit-il, il a mis trente ans à écrire, ou encore d’Armand
Dupuy avec cette phrase-clé « Le livre est ouvert,
il m’écoute ». Celle encore, de Jean-Pierre
Siméon dont voici un extrait :
« Non, tu ne fais pas de littérature. Tu fais de la
recherche fondamentale, tu cherches l’homme, en toi et en l’autre,
parce que tu sais depuis le début –et c’est je crois,
cette intuition qui fut décisive- que, contrairement à
l’opinion courante, l’humanité de l’homme n’est
pas donnée, elle se conquiert, elle s’édifie au
long d’un lent et laborieux processus de décantation et
de métamorphose.
L’art et la littérature ne sont qu’un moyen comme
le ciseau du sculpteur et son geste sont le moyen de trouver, dans la
matière hirsute et confuse, la forme juste.
Tu es donc, je ne sais si la formule est heureuse mais je n’en
ai pas d’autres disponibles à cet instant, un travailleur
de l’homme comme il y a des travailleurs du bois ou des travailleurs
de la mer. C’est un métier de chercher l’homme, de
faire l’homme, une tâche d’artisan qui ne s’apprend
pas au tableau noir mais sur le tas avec d’abord son ignorance,
sa maladresse, son incertitude, sa peur, à vaincre. »
Ce n’est pas sans émotion
que j’ai lu ces lettres. Elles m’ont remise face à
la gravité de ce qui se jouait là, ce choix à faire,
cette exigence. Un chemin où l’on sait, par ce livre plus
encore, que d’autres se sont engagés. Où l’on
a sa place aussi. Si l’on veut.
D’autres extraits et une présentation
de cette journée sont disponibles sur le blog d’Armand
Dupuy
http://tessons1.canalblog.com/
Sabine Chagnaud, avril 2008
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L’œuvre
de Charles Juliet trouve un écho fort avec le thème proposé
pour le 10ème printemps des poètes : l’éloge
de l’autre. Présence de l’autre en soi, bien
sûr, intime intrus qui longtemps barre la route ou figures de
l’absence auxquels CJ est attentif, auxquels il s’adresse
avec insistance (« Si tu pouvais ne plus te haïr. Ne
plus repousser ceux qui t’aiment. », Journal I, Hachette,
p.130 // « Ces jours, c’est l’anti-Juliet qui
règne. Epuisant combat. Parfois aussi dangereux qu’une
lutte au couteau. »,Journal II, Hachette, p.21). Mais présence
des autres également, de tous ces autres qui jalonnent son parcours,
dont certains (amis et lecteurs) se sont réunis ce 15 mars à
Lyon, invités par l’association La C@use des c@useuses
et la Médiathèque Marguerite Duras, pour lui rendre un
chaleureux hommage.
Jean-Claude Bourdais dans son journal évoque cette journée
:
http://www.jcbourdais.net/journal/16mars08.php
Parallèlement, publication d’un ensemble de lettres d’ami(e)s
chez Jacques André Editeur :
Voir le tiers livre de François Bon : http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article1217
ou mots_tessons : http://tessons1.canalblog.com/archives/2008/03/16/
Blog autour des textes de CJ :
http://charlesjulietsurcauseuses.blogspot.com/
Armand Dupuy, avril
2008