Des rêves au fond
des fleurs de Magali Thuillier ( éditions L’idée
bleue, collection le farfadet bleu ) évoque la vie quotidienne
avec des enfants, ce temps morcelé où alternent soins,
jeux, joies, déprime et coups de fatigue. La syntaxe bousculée,
la disparition de certains articles, les mots qui s’appellent
et se lient (soit par leurs sonorités, soit par le champ lexical)
ainsi que l’emploi d’expressions enfantines traduisent bien
le mouvement, le bruit des journées, les mille choses à
faire, les appels des petits, les cris, les pleurs.
une mère épluche et pleurnichures
de ci de là cuisine carreaux ras
le ciboulot les bras ballants les bras
aimants d’enfants pas trop savoir quoi
des sanglots quoi de bobos cui cui les
petits oiseaux pas vraiment ça
La grande justesse de ces poèmes bouleverse. Magali Thuillier
dit l’émerveillement mais aussi l’épuisement:
tout comme aussi trois ans en
sens arrière enfance cœurs soulagés
plus d’âge pas sages cascades de
rires sur la vie ricaneries c’est
rigolo la rigolette c’est merveilleux d’évidemment
de trop dire de trop crier brisée
solitaire taire ce qui tait à double
tour laisser bises bisous baisers lassée
jours de silence jours de clémence
toujours trop peu tenir le rien le peu
venir s’écrire
L’écriture et la lecture offrent un ailleurs
à la mère de famille, une échappée où
se retrouver en dehors de l’univers familial :
des livres à la pelle en tas par
centaines certaine se retrouver dedans
loin des mamans marmailles maris les
ailes au plus près du ciel dans les
livres elle sait
J’ai lu ce recueil avec émotion, en reconnaissant
des morceaux de ma propre vie dans ce tableau chaleureux et contrasté
du quotidien. J’ai aimé cette jubilation à jouer
avec les mots, la vitalité qui émane de ces poèmes
courts.
Les illustrations d’Anah Merlet, tendres, colorées, répondent
de belle façon aux poèmes de Magali Thuillier.
Cécile Thibesard, Juillet 2008