TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Les bonnes feuilles de Terre à Ciel -
Sabine Macher ~ Un temps à se jeter ~ Maeght, 1992

 

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On peut passer à côté de la poésie de Sabine Macher. Elle possède une voix singulière et un ton minimaliste. Et tout ce qu'elle dit semble simple, anodin. Pas d'envolée. Pas de jeux de mots. Rien pour faire joli. Rien pour accrocher. Si ce n'est cette voix.
« Un temps à se jeter » est son troisième ouvrage paru chez Maeght en 1995. Photographe, danseuse, traductrice, Sabine Macher est née en Allemagne de l'Est en 1955 et vit en France depuis 1976. Son premier livre, « Le lit très bas » paraît en 1992 suivi de « Ne pas toucher ne pas fondre » (1993), tous les deux chez Maeght.
Au travers de ses livres, et notamment celui-ci, elle fait une description de faits et gestes du quotidien. Elle écrit. Elle se promène. Elle fait le ménage. Elle emmène sa fille à la crèche. Elle évoque sa vie de tous les jours. Elle. Son compagnon. Leur vie de couple. Sa fille. Sa vie de danseuse. On la suit pas à pas. Et alors? Alors, elle construit le portrait d'une femme grâce à ces mille détails. Elle souligne le quotidien, la confondante banalité de nos existences.
On déboule dans le texte comme dans sa vie. Il n'y a pas de majuscules. Les textes sont courts. Ils se déroulent de la même manière : une phrase de quelques mots puis, à la ligne, un petit paragraphe. Rien ne vient heurter la prose. Tout est régulier. Et la poésie parvient à se trouver une place. Extraits.


« je me sens
plus vieille que mon âge, les envies ont du mal
à se tenir »

« j'ai deux pull-overs
c'est trop, l'ordinateur est encore éteint, j'ai des
choses à lire et à écrire, trop de choses, c'est ce
que je veux »

« tout le monde
écrit sur tout. je voudrais écrire aussi et comme
personne. je n'ai pas de travail »

« la poussière
est autour du lit, sous la table. constant va se
promener avec lone et moi dans ce silence, avec juste
le chauffage et un peu de soleil, je passe l'aspirateur »

« il fait
un temps à se jeter par terre. les avions, les
insectes, les vieilles du marché. le ciel est gris
de neige, il ne pleuvra pas. les clochards ont
froid, ils redoublent leurs manches »

« le soir
une représentante de france loisir passe pour
me donner la carte d'accès à leur magasin privé.
je lui dis que je ne lis pas »

« à côté du jardin
du luxembourg, rue de fleurus, c'est une belle
journée d'hiver, sur le visage des étudiants la
lumière va avec le sourire »

« j'ai pris la journée
pour moi, pour écrire. j'ai cousu »

« je n'ai pas pu
écrire si longtemps, toujours la vie est présente
et m'empêche, lone, constant, toutes ces
paroles à donner »

« je mange un peu,
de la vieille salade, des vieux fromages, je fais
la vaisselle entre les bouchées, demain je
retourne danser »

Autres publications :

«Une mouche gracieuse de profil » (Maeght, 1997)
« Carnet d'A » (Théâtre typographique, 1999)
« Rien ne manque au manque » (Denoël, 1999)
« Adieu les langues de chat » (Seghers, 2002)
« Le poisson d'encre dans ma bouche n'est pas à sa place » (Ed. 1:1, 2003)
« Portraits inconnus Melville » (Léo Sheer, 2004)
« Himmel und ende, suivi de Carnet » (Théâtre typographique, 2005)


sophie g.lucas (janvier 2009)

 
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