Voici
sans doute le premier recueil de Thomas Vinau vraiment accompli. Le
premier et sûrement pas le dernier pour cet auteur tout juste
âgé de 30 ans.
Le poème qui donne son titre à l’ensemble des soixante
dix textes réunis ici est déjà un chef d’œuvre
en raccourci : « les chiens errants n’ont pas besoin
de capuche » : cette beauté sauvage et fragile à
la fois qui ne revendique pas la protection.
Dans chacun de ses courts poèmes centrés sur la page,
Thomas Vinau sait toujours emmener le lecteur là où il
ne s’y attend pas. La preuve : « Eh bien les poèmes
de Carver / sont des jus de carotte ».
Souvent, il part des choses qui l’entourent et de cette observation
tire une morale qui peut être interprétée, je vous
le rassure, comme étant une absence de morale : « si
chacun remplit sa part du contrat / tout devrait bien se passer ».
L’exercice ne devient pas pour autant ennuyeux, puisque Thomas
Vinau sait lever le nez de son décor matériel. La poésie
du quotidien, si jamais elle existe, s’aère l’esprit,
y gagne en consistance, en sort renouvelée grâce à
cet aller-retour constant entre les choses de la vie et la vie rêvée,
une vie de héros, variée.
L’auteur ne cherche pas non plus à dissimuler ses faiblesses.
Simplement, en suivant la direction de la lumière comme elle
est, le poème s’ouvre au monde ou au contraire bascule
dans le sombre. Car il ne faut pas sous-estimer cette part de nous-mêmes
: « elle te mâchera lentement / cette vie / et ta silhouette
ne sera plus / que l’empreinte froide / de ses dents ».
Certains poèmes, en l’absence d’images alambiquées,
semblent même ne plus être des poèmes… tout
en demeurant poétiques : «Je me retrouve toujours /
avec des poils de chien / sur le jean / ou de la boue / sur les godasses
/ le tout saupoudré / en hiver / d’une vieille odeur /
de saucisse fumée / à cause de la cheminée ».
J’insisterai pour finir sur la fluidité du style, qui rend
facile la lecture de ce recueil et incite, comme avec des haïkus
réussis, à une véritable introspection.
Bref, pour qui aime encore la poésie en cette fin d’année
2008, il est recommandé de lire d’urgence « Les
chiens errants n’ont pas besoin de capuche ».
Patrice MALTAVERNE
Décembre 2008
LES CHIENS ERRANTS N’ONT PAS BESOIN DE CAPUCHE,
de Thomas VINAU, éditions Gros textes Fontfourane 05380 CHATEAUROUX
LES ALPES, http://www.grostextes.com/
6 €