TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Terre à ciel des poètes - Paul Celan

 

Sur Paul Celan
Présentation
Extraits de Contrainte de la lumière
Extraits de Grille de parole
Extraits de De seuil en seuil
Extrait de Renverse du souffle
Extrait de La rose de personne
Sur internet
Bibliographie

Les fiches des poètes

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On ne reste jamais longtemps devant soi, pour autant qu'on y parvienne

Antoine Emaz - Lichen, lichen

Présentation


Né le 23 novembre 1920, au sein d’une famille juive allemande à Cernauti dans l’actuel Ukraine, Paul Celan (de son vrai nom Ancel en roumain) est le poète de langue allemande le plus universellement étudié aujourd’hui. Il meurt à Paris le 20 avril 1970, en se jetant dans la Seine. Très fortement marqué par l’expérience concentrationnaire, Paul Celan contredit la fameuse parole du philosophe Theodor W. Adorno selon laquelle : « écrire un poème après Auschwitz est barbare. » Son travail poétique effectué à l’intérieur de la langue même des bourreaux est exemplaire d’un courage poétique immense qui le conduira au cœur d’une écriture complexe, discontinue et particulièrement saisissante.
Parmi ses œuvres les plus célèbres, on peut citer les poèmes des débuts (Le Sable des urnes) ainsi que Fugue de la mort, La Rose de personne, Cristal de souffle ou encore Noir péage. Comme il l’écrivait lui-même dans une lettre de 1946 : « … je tiens à vous dire combien il est difficile pour un Juif d’écrire des poèmes en langue allemande. Quand mes poèmes paraîtront, ils aboutiront bien aussi en Allemagne et – permettez-moi d’évoquer cette chose terrible –, la main qui ouvrira mon livre aura peut-être serré la main de celui qui fut l’assassin de ma mère… Et pire encore pourrait arriver… Pourtant mon destin est celui-ci : d’avoir à écrire des poèmes en allemand. »
monumenta

Paul Celan - extraits de Contrainte de la lumière


EVADES,
les perroquets gris
disent la messe
dans ta bouche.

Tu entends ce qu’il pleut
et tu crois que, cette fois encore,
c’est Dieu.

***

MOI AUSSI, qui suis né comme toi, nulle main ne me tient,
et nulle ne me jette un bonheur dans l’heure, pas plus qu’à toi,
immergée comme moi dans le sang de taureau,

pourtant les nombres se tiennent prêts à éclairer la larme
qui fuse dans le monde
hors de notre nombril,

dans la grande écriture syllabique entre pourtant
ce qui nous a approchés, chacun,

et le testicule en amande
orage
et fleurit.

Paul Celan - extraits de Grille de parole


EN BAS

Rapatrié dans l’oubli,
le dialogue convivial de nos
yeux lents.

Rapatrié syllabe après syllabe, réparti
sur les dés aveugles le jour, vers quoi
se tend la main du joueur, grande,
dans l’éveil.

Et le trop de mes paroles :
déposé sur le petit
cristal dans le fardeau de ton silence

***


UNE ETOILE DE BOIS, bleue,
faite de petits losange. Aujourd’hui, par
la plus jeune de nos mains.

Le mot, pendant
que tu précipites le sel de la nuit, le regard
cherche à nouveau la lucarne :

- Une étoile, mets-la,
mets l’étoile dans la nuit.

(- Dans la mienne, la
mienne.)

Paul Celan - extraits de De seuil en seuil


Celui qui nous comptait les heures
compte encore.
Que peut-il bien compter, dis ?
Il compte, compte.

Il ne fera pas plus frais,
ni plus nuit,
ni plus humide.

Seul ce qui nous a aidés à guetter :
guette maintenant
pour soi.

***

D’une clé qui change,
tu ouvres la maison où
tournoie la neige des choses tues.
Au gré du sang qui sourd
de ton oreille ou ton œil ou ta bouche,
ta clé change.

Ta clé change, le mot change,
qui peut partager la course des flocons.
Au gré du vent qui te repousse
La neige se roule autour du mot.


Paul Celan - extraits de Renverse du souffle


Noirs
comme la blessure de souvenir,
les yeux fouillent et te cherchent
dans le pays de couronne mordu
à blanc par des dents de cœur,
qui est toujours notre lit :

c’est par ce puits creusé que tu dois venir –
tu viens.

Dans le sens
de semence
la mer t’étoile, au plus intime, à jamais.

Donner des noms a une fin,
sur toi je jette mon destin.

***


Sous la peau de mes mains cousu :
ton nom consolé
avec des mains.

Quand je pétris la motte
d’air, notre nourriture,
la lueur de lettres passée par le
pore
ouvert-délirant la
surit.

Paul Celan - extraits de La rose de personne


Ce n'est plus
cette
pesanteur parfois
plongée dans l'heure
avec toi. C'en est
une autre.

C'est le poids retenant le vide
qui avec
toi irait.
Il n'a, comme toi, pas de nom. Peut-être
êtes vous la même chose. Peut-être
me donneras-tu aussi un jour ce
nom.

***

Odeurs d'automne, muettes. La
fleur-étoile, non brisée, passa
entre lieu natal et abîme à travers
ta mémoire.

Une perditude étrangère
avait pris corps, tu avais
failli
vivre.


Paul Celan sur internet
Bibliographie (livres traduits en français)
• Enclos du temps, trad. Martine Broda, Clivages, 1985.
  • Schneepart (1971, posthume), poèmes, trad. André du Bouchet, Mercure de France, 1978 (rééd. 1986).
  • Pavot et mémoire, trad. Valérie Briet, Christian Bourgois, 1987.
  • De seuil en seuil, trad. Valérie Briet, Christian Bourgois, 1991.
  • Grille de parole, trad. Martine Broda, Christian Bourgois, 1991.
  • La Rose de personne, trad. Martine Broda, Le Nouveau Commerce, 1979.
  • Renverse du souffle, trad. Jean-Pierre Lefebvre, Seuil, 2003.
  • Contrainte de lumière, trad. Bertrand Badiou et Jean-Claude Rambach, Belin, « L’extrême contemporain », 1989.
  • Partie de neige, trad. Jean-Pierre Lefebvre, Seuil, 2007.

    Recommander ce site