TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Un ange à notre table-
Sylvie Durbec ~ extraits de La huppe de Virginia
à paraitre fin mars chez Jacques Brémond

 

Inédits d'auteurs que nous sollicitons

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


TROIS PAS DE COTE SA VOIX

de la marcheuse sa fierté et puis son pas
mais aussi la course dans sa voix
l’essoufflement comme point au côté
la certitude de ne pouvoir avancer un pied
après l’autre
au jardin
et sentir l’humilité du sol sous ses pas
tout ça qui la fait encore avancer
et marcher de haut en bas
cailloux graviers herbes ronciers
et de la colline jusqu’au sommet
tout en bas au plus loin en secret
marcheuse entêtée du matin / sa fierté

 

en marchant la marcheuse se demande
comment dire dans son poème les uns
oiseaux posés sur le pylône et les autres
mots posés sur le fil de la voix juste
ceux-là/ juste des formes de verre
qui vues de loin immobiles semblables
aux autres les vrais oiseaux étourdis
oui comment faire pour qu’on les voie
ensemble les uns avec les autres
mais qu’on voie aussi la différence
entre le mot oiseau et ces animaux
capturés dans le regard jeté sur le pylône

 

et ce geste celui de tendre
à l’autre celui qui ne peut
l’objet vers lui d’essayer
une aide de quoi exactement
être l’instigateur d’un acte
ce geste et celle qui l’exécute
une aide et voilà que la faiblesse
s’organise et la bouche s’entrouvre
et la main s’essaie à nouveau
dans le geste de donner à manger
à l’autre celui qui ne peut
ni même parler par cette bouche
rien à faire de possible rien
que cette ouverture noire
manger parler crier SILENCE


 


LA VOIX MATINALE

la voix c’est aussi cette feuille trouvée
sur la table au petit déjeuner alors que
tristesse s’était assise à la table inquiète
et puis feuille rousse dépliée un baiser
allège de son poids petit l’ajournée
devenue le temps de l’action et de dire
un jour à construire dans le désir

 


LA VOIX DES IMAGES

et le tableau
a-t-il une voix et laquelle
comment l’entendre cette voix
est-ce qu’elle parle féminin ou masculin ?
ne serait-ce-t-elle pas cette déchirure entre le cadre et la toile
cette raclure ocre et à demi effacée
comme un peu de peinture oubliée à
demi cachée et pourtant présente à
celui qui regarde et ne la voit pas ou alors à
peine et je regarde à mon tour défiler les pièces de la maison
à la recherche du centre de la toile
là où se perd le regard dans la couleur absentée
à la recherche du centre
celui perdu après lequel nous courons
où se lit encore la signature du peintre
celle qui a disparu
quelques lettres au pinceau
et puis plus rien
sauf le tableau

 

 

ENCORE


amitié avec les voix du silence………………………oiseaux colline pays anciens et chemins………………………ce nom aimé d’une voix impossible à prononcer dans la bonne langue du vieux pays maternel/essayer de le prendre dans la bouche avec la voix et…………..rien ne se passe….ou bien on n’entend pas ce qui passe par le souffle peut-être retenu……………puis tout disparaît………désert….on renonce….coquetterie désuète………la voix s’essaye à dire encore un peu puis amitié neuve avec les collines les espaces gris les vides la plaine le haut le bas…paradis dont on ramasse les débris pour en faire un abri où passer la nuit

Mais il y a aussi la voix
des enfants derrière la porte
dont on ne sait dire si fille ou garçon
voix qui parle enfant seulement
voix des enfants devant le dormir
dont on ne sait si elle est pleur ou rire
langue de nuit langue de jour seulement
ce murmure de rêves enchevêtré de noir
Mais il y a aussi
tapi derrière la voix des plus petits
l’écho de celles qui sont parties
Mais il y a aussi
ce qui ne s’entend pas / leurs voix
petites et fortes agrippées au silence des routes
à qui on les confie au moment du voyage à la fin
du poème
Mais il y aura encore
ces voix d’enfants inquiètes
que poings sur oreilles serrés je continuerai à
entendre derrière portes murs
et même fenêtres

petites et fortes entendues encore
même tues même mortes

 


Sylvie Durbec est née à Marseille en 1952.
En 1995, elle publie un long texte poétique Marseille éclats et quartiers dans la revue de Michel Deguy, Po&sie n°71, ce texte a reçu en 2008 le Prix Jean Follain et sera publié aux éditions Jacques Brémond,
en 1997 un conte pour enfants aux éditions GRANDIR, Le nom du roi,
en 1998, est invitée en résidence d’écrivain en Cévennes et y anime un atelier d’écriture, y termine une pièce de théâtre, Une après-midi avec Jack Kerouac, pièce en deux tableaux et deux jardins, inédite,
en 1999, encore de la poésie, in revue Po&sie n° 89,
en avril 2000, de la poésie encore, in revue Bleue, n°2,
Invitée également à Rappallo, en Italie au mois d’avril par Marco Ercolani et Luisella Carretta, à l’occasion de la publication de la revue Scriptions consacrée à Saorge où elle fut en résidence d’écriture en juillet 2003, ses poèmes NUITS de SAORGE traduits en italien par la poète Lucetta Frisa ont été lus à la Biblioteca Internazionale de la ville. Un texte Walser à Marseille est publié dans la revue Arca, à Gênes en 2005 et des traductions des Stanze dans la revue Ciminiera en avril 2005.

Invitée à Madrid par l’Institut français pour lire et parler de son écriture poétique aux côtés de Jacques Roubaud et P.Beck en mai 2007, ainsi qu’à participer à une anthologie de poètes d’expression française à paraître au Mexique aux éditions ESPEJO de VIENTO et à une anthologie de poètes femmes en Italie également, Donne di versi, parue en
2007.
En 2008 paraissent les Territoires de la folie, d’abord sur Amontour en ligne puis sur papier chez Cousumain. En novembre 2008 est invitée en Tunisie dans le cadre des échanges franco-tunisiens pour ses livres jeunesse et en particulier celui fait avec l’artiste tunisien Raouf Karay, Naissance d’un voyage.
A reçu en octobre 2008 le Prix Jean Follain pour Marseille, éclats et quartiers, édition Jacques Brémond, publié en 2010.
Novembre 2009 aux éditions Potentille, Comme un jardin( bleu)
Printemps 2010 : Prendre place, éditions Collodion
Juin 2010 : Chaussures vides/scarpe vuote au Dessert de Lune.
Octobre 2010 : La huppe de Virginia, tiré à part, livre d’artiste aux éditions des Aresquiers.
A reçu le prix du conseil général 13 pour La huppe de Virginia, recueil à paraître aux éditions Jacques Brémond en mars 2011.
Différents projets en cours dont un sur le sel et le métier de salinier avec le photographe et plasticien Didier Leclerc. Une traduction de l’italien de textes autour de la folie, dont la publication se fera chez un éditeur de Marseille, Daniel Labedan, Les Etats Civils.

photo : Didier Leclerc

 
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