luisantes sont les ardoises du
toit
tombe la pluie sur la maison
tombe la pluie aux alentours
contre les jambes de celle qui vit ici
se presse un chat noir
un chat noir se presse
celle qui vit ici ses jambes fatiguées
dehors faire le tour des champs
celle qui vit ici va faire
le tour des champs le tour des semailles
son incessant travail à mains nues
et le chat et le chat noir est sur ses pas
mais d'où viens-tu chat noir, dit celle qui vit ici
ma bénédiction à toi, oui ma bénédiction
à toi
de ce printemps et de l'été venant
hormis si c'est Stolven qui t'envoie
je ne veux pas de toi, je ne veux pas te voir
si c'est Stolven, mon fils, qui t'envoie
et elle se met à pleurer
taisez-vous ma mère ne pleurez pas
votre fils Stolven est venu vous voir
pour vous demander, ma mère, de me pardonner
votre fils Stolven est venu vous voir
et si vous ne le pouvez
si c'est mon fils Stolven que voilà
ma malédiction sur lui, oui ma malédiction sur lui
des couteaux de grêle et des gifles de vent
et qu'il s'en aille loin, au loin, loin
dit en traversant le pré celle qui vit ici
alors Stolven s'éloigne sur les routes,
sur les routes effaçant ses mauvais passages
s'éloignant Stolven croise son oncle
ne vous effrayez pas, mon oncle, oui c'est bien moi
je suis allé de bon cœur vers ma mère
son bon cœur qu'elle me pardonne
mais cela elle ne peut pas, elle ne peut, pas du tout
retournons ensemble, dit son oncle, toi et moi
tous les deux
voyez-le sur les routes effaçant ses mauvais passages
voyez-le depuis sept ans sur les routes effaçant ses mauvais
passages
trop dur est votre cœur, trop dur de refuser le pardon pour
Stolven, votre fils
mais celle qui vit ici s'écrie des malheurs il m'a faits
mais celle qui vit ici s'écrie trop de malheurs il m'a
faits
pour Stolven qui était mon fils, je ne peux
incendié sept meules de blé il a, et dire cela n'est
rien
tuer trois de ses sœurs aussi il a, et dire cela n'est pas
assez
tuer un médecin qui soignait un vieil homme et dire ceci
est beaucoup
et dire et dire et dire, ce n'est pas le pire
perdu mon livre il a, mon petit livre si précieux
écrit au long des jours, écrit au long des nuits
perdre celui-ci est l'immense offense
taisez-vous ma mère ne pleurez pas
ma mère ne pleurez plus, je sais
votre livre n'est pas perdu, votre petit livre n'est pas perdu
celui-ci se trouve dans la mer profonde, à trente brasses
dans la bouche d'un petit poisson qui le garde
taisez-vous ma mère ne pleurez pas
ma mère ne pleurez plus, je sais
votre livre n'est pas perdu, votre petit livre n'est pas perdu
celui-ci se trouve dans la bouche d'un petit poisson
le poisson maintenant dans votre maison
taisez-vous ma mère ne pleurez pas
ma mère ne pleurez plus, je sais
votre livre n'est pas perdu, votre petit livre n'est pas perdu
celui-ci se trouve sur la table ronde dans votre maison
n'y manque que trois pages mouillées
l'une par l'eau, l'une par le sang, l'une par les larmes de vos
yeux
oui l'une par les larmes de vos yeux
je donne ma bénédiction à
Stolven, mon fils
quand je retrouve mon petit livre
quand mon petit livre est retrouvé
qui passe par là sur un cheval blanc
qui passe par là sur un cheval blanc et blanc lui-même
?
quand le coq chante à minuit les malheureux chantent sur
la terre
quand le coq chante au jour venant les malheureux ne le sont plus
et Stolven chante avec eux
© Lou Raoul, Stolven, extrait de Friches / ensemble inédit
d'après un chant traditionnel breton intitulé Skolvan
ou Stolven.
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