I Goguenardes les pies
chair d’humain tout ça si lourd
tout ça que les vers
pas assez de plumes
Le jeu commence queue de billard
rouge éclate
contre la tempe blanche
boules roulent
Dans le trou du souffleur
Il n’y a personne
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III Il faut beaucoup de temps pour que
se lave la voix des acquiescements des silences des graviers des
saletés rauques des moisissures de l’immobile
Des années à regarder l’oiseau
se faire dévorer
les plumes encore aux dents le chat
vous fixe oh fuir où s’enfonce le puits jusqu’au
lieu sans lueur pour rappeler le jour tu veux croire au silence
où la pulsation noire seule habite l’espace du corps
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VII Assez de me manger la langue
j’en ai fini du cercle
d’entendre dans le noir
les pulsations
sourdes
le futur antérieur palpite un dernier souffle
et ne m’attendrit plus
à présent je te parle
où
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IX Tendu entre
pas dire les mots trop grands
cacher murmure pourrait
faire rire
le bouc qui va mourir
tendu le fil extrême
je suis d’avant l’archet je suis corde
violon
juste avant les stridences
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Lignes lignes de notes bousculent où
sont mes passages chercher passage note basse espace du piano
saturé saturé où je vais moi toi tu croises
me croises en croix je suis barrée passer où glisser
les doigts attends attends plus de moi je ne trouve plus mes bords
De l’une à l’autre doigts touchent
peau où commence territoire terres croisées
Boise soi froisse à peine et tresse d’espace le lien
ne pas lâcher les lignes des lieux du lien rien à
lire mais tout se lie
Espaces espaces dépliés je vois
se déployer des routes et des traces et je pose mes pas
dans ces traces je me fonds chemins déjà tracés
chemins déjà usés va plus loin après
les cartes il y a du bleu d’improbables matins
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Comment travailles- tu tes écrits ?
Le souffle, la voix, je les oralise intérieurement,
la mise en page est une application de la mise en voix, les silences,
les respirations sont marqués par les blancs plus ou moins importants.
Ensuite, je suis toujours sur ce difficile chemin de crête entre
fluidité et maigreur…
D’où vient l’écriture
pour toi ?
Cette question ouvre un abîme…je ne suis pas sûre
de vouloir en approcher.
Ou disons que l’écriture permet de tourner autour. Et de
ne pas tomber.
Ta bibliothèque idéale ?
Elle serait énorme…mais pour tenter l’ascèse
d’une bibliothèque minimale :
- la prose de Duras à partir de Lol V. Stein, dans la
respiration de laquelle paradoxalement, j’aime retrouver ma respiration
poétique ;
- Il y aurait une anthologie de Haiku, l’œuvre de René
Char, Jacques Rebotier et James Sacré ;
- Et si possible,un recueil de Hélène Mohone, Anne Cloutier,
Edith Azam, Albane Gellée, Fabienne Yvert, Valérie Rouzeau,
Jean Pascal Dubost, Arno Calleja…
- Il y aurait des romanciers japonais de Kawabata et Inoué à
Murakami ;
- Et sans aucun doute, Ecrits sur l’art et Pensées
détachées de Jean Marie Pontévia ;
- Et des calligraphies de Fabienne Verdier ( Entre ciel et terre).
Charamnac Stupar Claudine, professeur
agrégée de lettres, créatrice de Singulier
Pluriel, le Printemps des poètes à l’Iufm d’Aquitaine
(2000-2010), réalise des spectacles de poésie (La
Résistance du Magnolia avec la chorégraphe Isabelle
Lasserre, 2009) auteur de livres d’artiste : Lunatiques, Les
arbres ne sont pas de bois, et, à La Gabouliane Edition,
d’un recueil, Pulsations, d’un oratorio Marchands
de sables et de vague (compositeur Christian Lauba, représenté
en 1993 à Bordeaux, Blois , Les Sables d’Olonne). Quatre
fois rien est paru en 2009 dans le livre d’artiste Diafragments
de la plasticienne Nicole Morello.