TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Voix du monde ~
Anupama Raju
(traduction française : Roselyne Sibille)

 

Retour aux voix du monde

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 


1. On borders

Borders are like smiles:
Deceptive, transient lines,
sliding into lies.

Like the grains of sand
in distant deserts: flying
with winds. Homeless.

Like the songs of love
they once sang to each other:
Memories of pain.

Borders are like dreams.
Creeping into dark bed folds.
Real, not real enough.

Glass windows or walls
Never see them until late.
Fragility lies.

Like spluttering streetlights
that live and die instantly.
Undependable.

Or like marriages,
devotion, dedication:
Conditions apply.

But not like shadows:
Alive at noon, dead at night.
They don’t disappear.


1. A propos des frontières

Les frontières sont comme des sourires :
des lignes trompeuses, transitoires,
qui dérapent en mensonges.

Comme les grains de sable
dans les déserts lointains : volant
avec les vents. Sans domicile fixe.

Comme les chansons d'amour
qu'on se chantait jadis l'un à l'autre :
Souvenirs de souffrance.

Les frontières sont comme des rêves.
Se glissant en sombres plis de lits.
Réels, pas assez réels.

Fenêtres ou murs de verre
On les voit toujours au dernier moment.
La fragilité ment.

Comme des grésillements de lampadaires
qui vivent et meurent au même instant.
Pas fiables.

Ou comme des mariages,
dévotion, dévouement :
conditions à appliquer.

Mais pas comme des ombres :
en vie à midi, défuntes à la nuit.
Elles ne disparaissent pas.


A folk song

I was once your birthplace, your maternal village.
You grew as they fed my trees in this leafing village.

You built me a temple and invoked my blessing
Did you know I’d bring rain to desert, my sleeping village?

The rain filled your stomach, you rose with water,
poured into an empty nest - your weeping village.

Floods came, you sang me songs, dried my tears
but my rivers wouldn’t nourish you seeping through the village.

You let go of my hand, cursed my love for you
chose a new mother instead of me, your heaving village.

Summer’s ripe with memories of you, my children
But don’t come back to me, to your seething village.

Une chanson populaire

Un jour j'ai été votre lieu de naissance, votre village maternel.
Vous grandissiez au fur et à mesure que, dans ce village feuillu,
on nourrissait mes arbres.

Vous m'avez construit un temple et vous avez invoqué ma bénédiction
Saviez-vous que j'apporterais la pluie dans le désert, mon village endormi ?

La pluie emplissait vos ventres, vous grandissiez avec l'eau
déversée dans un nid vide - votre village en pleurs

Les inondations sont venues, vous me chantiez des chansons,
essuyiez mes larmes
Pourtant mes rivières ne pourraient pas vous nourrir,
tandis qu'elles s'infiltraient à travers le village

Vous avez lâché ma main, maudit mon amour pour vous
choisi une nouvelle mère à ma place, votre village bondé

L'été est là avec des souvenirs de vous, mes enfants
Mais ne revenez pas vers moi, vers votre village grouillant de monde.

("A Folk Song" a été publié pour la première fois dans "Mint Lounge" en novembre 2010
Mint Lounge est un journal d'affaires d'Inde, en partenariat avec Wall
Street Journal. 'Mint' publie de temps en temps des articles/extraits
littéraires, poésie, etc.)

Bhayanakam - Horror
One day the mirror will swallow
my head, your body, my hands, your touch
your bone, my skin, your today, my tomorrow.
One day the mirror will turn into a swallow
fly into my face, peck on my tongue’s hollow.
Your blood, my nails, my wings, your clutch.
One day, I will mirror, will swallow
your head, my today. Your bone, my tomorrow.

Bhayanakam – L’horreur
Un jour le miroir avalera
ma tête, ton corps, mes mains, ton toucher
tes os, ma peau, ton aujourd'hui, mon demain.
Un jour le miroir deviendra hirondelle
qui volera dans mon visage, picorera le creux de ma langue.
Ton sang, mes ongles, mes ailes, ta couvée.
Un jour, je reflèterai, j'avalerai
ta tête, mon aujourd'hui. Tes os, mon demain.
(Ce poème fait partie des poèmes qu'Anupama Raju a écrit sur les "navarasas", les neuf émotions, il y a neuf poèmes en tout)


Anupama Raju est née à Chennai, en Inde du Sud, dans une famille de musiciens.
Elle a été entourée par la musique pendant son enfance. Anupama est elle-même chanteuse. Toutefois, c’est dans la poésie qu’elle a découvert sa passion. Elle a commencé sérieusement son travail d’écriture en 2002 et depuis, son travail a été publié dans plusieurs publications, magazines, journaux littéraires. Anupama a reçu des prix de poésie aux concours
dirigés par le British Council-Unisun (2006) et par la Fondation Prakriti (2008).
Journaliste, Anupama écrit sur la littérature et les écrivains pour un journal indien, The Hindu.
Elle travaille aussi dans le domaine de la traduction et elle aime particulièrement traduire des nouvelles du malayalam (la langue du Kerala) vers l'anglais.

Publications:
Harper Collins Book of Poems (2012)
http://pratilipi.in/2009/03/the-mocking-laughter-of-religious-wars/6/
http://www.livemint.com/2010/11/19211853/Free-Verse--Anupama-Raju.html
http://www.caravanmagazine.in/Story/972/Poem-for-a-Window.html
http://www.asiawrites.org/2011/02/featured-poem-poems-of-eden-byanupama.html
http://www.poetrywithprakriti.in/08anupama.html
Prakriti Anthology, 2007-2008.
Mosaic Anthology of Poems, 2008
Winners Anthology, Unisun-British Council, 2006
The Little Magazine, Ghosts Issue, vol 4, issue 4.
Ten Indian Poets, Nirala Publications (en cours de publication)

 
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