TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Voix du monde ~
Mehrdad Arefani
(traduction française : Sabine Huynh,
version anglaise : Abol Froushan)

 

Retour aux voix du monde

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 


Sarajevo

You were not on the stairway to the plane
You were just kisses tip to toe
I was sneaking out of the sky of Tehran
sunlight on the airport and windows
sometimes there sometimes not
There, people passed by – some like you
who you were not
Tehran’s sky is receding in plumes,
neons and shambled houses in the distance
Forty degrees below zero, white clouds
Now you are ambling through them
I want to jump out
and hug you
Clouds merge, some like you
sometimes there, sometimes not
They come together and break away
I put hand to my lips and blow you a kiss
The crimson sunlight above Istanbul
lands October on my calendar
Clocks merge
Tongues meld
Clothes mix up
Blonde hairdos
Revealing figures
Tourists, guardrails
I am moving your luggage in my mind


Sarajevo

Ce n’était pas toi sur la passerelle de l’avion
toi qui n’étais que baisers de la tête aux pieds
apeuré, je sortais en douce du ciel de Téhéran
jeu de cache-cache du soleil
sur l’aéroport et les fenêtres
des fois là, des fois pas

Là-bas, des gens passaient
– certains te ressemblaient
toi qui n’étais pas eux

Le ciel de Téhéran, rare et lointain
derrière les panaches de fumée
les néons et les maisons chamboulées

Moins quarante degrés
des nuages blancs sur lesquels
j’ai l’impression de te voir
en train de déambuler
je veux sauter dehors
pour te prendre dans mes bras

Les nuages se fondent
certains te ressemblent
des fois là, des fois pas
ils se rencontrent, se séparent
ma main s’approche de mes lèvres
je t’envoie un baiser

La lumière cramoisie
du soleil au-dessus d’Istanbul
me mène à octobre dans le calendrier
les heures décalées fusionnent
les langues s’entremêlent
les vêtements se confondent
des coiffures blondes
des corps attirants
des touristes, des rambardes

Je déplace tes bagages en pensée

****


Apple

Friends don’t hear the future
they are of the belief
that one should live sweet and sour

A broken barrow and a lantern
take leave of the Friday market

A flowery serving dish and a few saucers
the new year breaks and
a knife peels the future

La pomme

Les amis n’entendent rien à l’avenir
ils sont du genre à croire
que la vie doit être aigre-douce

Une brouette cassée et une lanterne
quittent le marché du vendredi

Un plat orné de fleurs, des soucoupes
la nouvelle année a commencé
un couteau épluche l’avenir

 

***


Mehrdad Arefani est un poète dissident iranien né en 1963 à Shahsavar, une ville portuaire du nord de l’Iran, au bord de la Mer Caspienne. Il est emprisonné pour la première fois à l’âge de dix-huit ans, à cause de ses opinions laïques, qui déplaisent aux intégristes musulmans. Il passe plus de cinq ans à être balotté de prison politique en prison politique.
C’est à partir de l’âge de trente ans qu’il commence à écrire des poèmes. Rapidement censurés et interdits à la publication, ceux-ci paraissent néanmoins dans des revues subversives, dont Adineh, très connue parmi les dissidents.
Après avoir fui l’Iran en l’an 2000 pour Istanbul, puis Sarajevo, l’Italie et la Belgique, il s’installe à Bruxelles, où il utilise activement l’Internet et les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, YouTube) pour diffuser ses créations. Il édite également un magazine en ligne : hashtaad.com

Sa poésie est politique mais sobre, sans rhétorique, ni dogmatisme. Ses thèmes de prédilection sont l’exil, l’errance, et les lieux rencontrés en chemin, qui façonnent l’identité et les souvenirs.

Bibliographie :
Branch of Sunlight, 1992, jazma.org
From Tree to Tree, Dena, Bruxelles, 2010

Voir son site pour en savoir plus : http://www.jazma.org/

N.d.T. : Une traduction française d’un certain nombre des poèmes de Mehrdad Arefani se trouve actuellement sur son site, mais elle est très problématique (à cause notamment des nombreuses fautes de langue). Je l’ai signalé au poète, qui a suggéré que je corrige ces traductions. J’ai bien évidemment préféré retraduire les poèmes, à partir de la version anglaise proposée par le poète Abol Froushan. Lorsque des formulations étaient ambigües en anglais, j’ai fait appel à un ami iranien et nous sommes partis du persan (Reza Fathi, que je remercie pour son aide précieuse). Je remercie Mehrdad Arefani pour sa confiance.
Vous trouverez les versions anglaises et persanes des textes sur le site de Poetry International : http://www.poetryinternationalweb.net/pi/site/poet/item/21516


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