TERRE à CIEL Poésie d'aujourd'hui

Voix du monde

 

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Textes inédits extraits de Le Chemin de l’aube, Alfonso Alegre Heitzmann,
traduits par Jean Gabriel Cosculluela 
à paraître aux éditions Voix d’Encre en mars 2006 - Lire la version originale ?

Des sons que la forêt aime

Oh espoir ! Très bientôt ces forêts ne seront plus les seules à chanter l’honneur de la vie

Friedrich Hölderlin


La voix des forêts est un univers au-dedans.

 


Il n’y a que les forêts qui parlent, il n’y a qu’en elle que se donne l’ivresse intime de la parole, le chant profond, muet, qui s’élève tout en descendant vers son centre invisible.

 

 

La forêt écoute le chant de l’oiseau, la brise dans les feuilles, le murmure de l’eau, et, parfois, le passage, presque furtif, d’un homme.

 

 

Un arbre dans l’invisible donne l’or à un espace de soleil ; regarde la brise dans tes mains.

 

 

Il y a un dedans de l’air, lieu, où les feuilles hautes brillent, vibrent, absentes dans la lumière de leur infini.


Jusqu’où sais-tu ton silence ? La forêt, comme le ciel étoilé, garde son infini.

 

Dans la pénombre de la forêt le soleil nous parle.

 


Nous sommes à l’intérieur du monde, en son cœur même.

 

Chaque geste meurt à l’intérieur de la vie.

 


Chaque être doit trouver (rêver ou veiller) l’origine de son silence, pour mourir et vivre dans son infini.

 


Il n’y a pas d’autre parole que celle de la forêt muette.

 

 


A fleur de lumière

A Jean Gabriel Cosculluela


Nous vivons reclus, enfermés dans les limites de notre parole.

 


Les mots sont arrivés jusqu’ici, mais nous avons oublié leur chemin. Nous parlons avec des mots sans mémoire.

 

Sur quel seuil de la parole naît le poème ? Quand le sens devient-il présence ?

 


Il y a quelque chose d’infini en nous, par peur nous ne lui donnons pas de nom.

 


Dans le mirage de la lumière boit l’alouette.

 

Tu silences le mot qui te nomme, et tu écris dans le vide qu’il laisse, le nuage, qui est sans aucun mot, l’oiseau, qui trouve maintenant l’espace où voler en toi, au-dehors de toi, dans le lieu que le mot a laissé.
Dans l’espace d’un mot muet l’univers parle.

 


Sur la ligne, la clarté nue ; à l’intérieur, blanc profond, le temps.

 

 

 

Sur la page de la peau

A Victoria Pradilla

 

 

Tu ne pourrais pas nommer ce que tu nommes maintenant si de l’arbre les feuilles ne tombaient pas sur les feuilles, sur l’amour, sur la mort. La langue des feuilles, le rien du dire, premier, la langue, rien. La langue des feuilles est sur leur tombée, le soleil qui donne l’or à l’envers et à l’endroit, à l’endroit et à nouveau à l’envers. Dire qui n ‘a pas le temps, mais l’espace ouvert, qui tombe dans son dire, à la verticale, temps donné. Le temps est une lumière et la lumière tombe, le temps est un dire.

 

 

Dire aride et, cependant, voici l’eau sur les pores de ta peau, dans la soif, dans le désir. La lune au-dehors – elle attire des vagues silencieuses. Le désert seul, l’immensité. La lumière seule, à la verticale ; blanche sur les corps, dans l’amour.

 

 


Sur la page de la peau ; ombre de lune, désert de lumière blanche, fleur de lumière, fente obscure. La lumière muette ouvre ma main, devient ombre pour toucher ton corps, pour silencer ta bouche, verticale dans le signe de tes lèvres. L’amour se silence, le silence se silence dans la nuit, le vent se silence et se silence encore, l’eau coule dans le lit du petit cours d’eau, elle coule dans le silence et se silence, elle court dans le dire. L’amour de l’eau qui dit « nuit » entre les pierres. Dire aride et transparent.

© Alfonso Alegre Heitzmann & Jean Gabriel Cosculluela, mars 2006. Tous droits de reproduction réservés.

 


 
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