Mais il y a l'écumeur des grands chemins, et le coureur des mers.

René Guy Cadou - les liens du sang

Un peu de nulle part. Cherche un lieu pour m'établir, pas sûr qu'il existe, que j'y ait droit.
Ecris depuis l'âge de douze ans, pour moi seule. Ecriture étouffée.
Des auteurs m'ouvrent des portes. Sylvie Germain, Michel Jourdan et Christian Bobin sont traces plus pénétrantes. Puis Charles Juliet, au plus intime, jusqu'à ne plus se reconnaître. J'apprends à descendre "Il n'est de force véritable que par une vulnérabilité extrême, lorsqu'il n'y a plus de barrières, de peur, de remparts, et que tout est vécu" (Charles Juliet, Journal II)
Pas encore fini avec la peur, mais trouvé ce renversement : la possibilité de l'Ouvert.
Aujourd'hui médiatrice du livre, un métier que j'aime profondément : être le lien, l'intermédiaire, pour que d'autres se penchent sur cette eau claire des livres, qu'ils y trouvent un visage où l'amour est possible

pas d'ta faute nous on sait qu'c'est toi on sait bien t'es méchant t'es jaloux tout c'que t'es tout c'que t'as c'est pas d'visage tu penses aller loin comme ça t'as trompé jusqu'à tomber tes yeux d' vinaigre tu tiens même pas tes mains debout rime à rien ta langue crasée par terre comme c't'arbuste qu'l'chien a bouffé l'a pas honte le chien c'toi qu'a honte va où cache tes mains ton visage cache ton corps cache toi tu fais tache t'es vilain pas beau
trou d'souris
t'es pas là
transparence (devenir)

silence sur tes doigts
une mère derrière l’arbre bâtit une place d’eau
sans enfants
son front craquelé de lait émiette sa persistance de bois mort
tu cherches l’entrée des signes
trop de terre jusqu'à la bouche

(sens interdit)

arrête
arrête tes pieds
arrête tes pieds veux-tu

les bras le long du corps
les bras le long du corps n'ont rien
les bras le long du corps n'ont rien tenu

depuis longtemps
depuis longtemps le visage
depuis longtemps le visage est tige

c'est ce qui tient
c'est ce qui tient debout
c'est ce qui tient debout pour hurler

hurler les pierres
hurler les pierres
dans la tête
elle casse

il est deux heures dans tes mains ouvertes
la nonne au regard fléché taille le lilas
en tombant les branches donnent des directions
résistantes à la lecture

tu restes dans le dessin de l'ombre
à brûler la chandelle de ta langue

reste un mot
sans clé ni légende
pris dans une pluie

attendez-moi me rattrape l'herbe devant

je l'atteins presque

jusqu'où je tombe si je tombe avant d'avoir pu

je cesse les phrases les ponts je cesse
.

un arbre, juste là derrière

un son
il est
dans ma main
couché

 

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